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France:

Les surdoués seraient des retraités plus heureux  

By Michaëla Bobasch, Le Monde  

January 23, 2004

 

Alors que les sujets intellectuellement précoces vivent souvent difficilement leur enfance et leur âge adulte, ils auraient en revanche une vieillesse réussie. Telle est la conclusion d'une étude originale intitulée Satisfaction de vie de 28  surdoués parvenus à 65  ans et plus. Cette étude, la première sur ce thème en France et en Europe, a été menée par Annick Bessou, gériatre, et Jeanne Tyrell, psychologue, maître de conférences à l'université Pierre-Mendès-France de Grenoble, sous la direction du professeur Alain Franco, du CHU de Grenoble.  

L'enfant surdoué, fortement en avance sur les enfants de son âge, est décrit comme créatif, curieux de tout, intuitif, mais aussi anxieux et hypersensible. Il présente un décalage important entre son développement intellectuel et psychomoteur  : ainsi, il lit très tôt et très bien, mais écrit de façon déplorable. Doté d'une excellente mémoire et habitué à tout comprendre aisément, il est souvent catalogué comme un élève "brillant, mais peu travailleur". Il fait l'impasse sur les méthodes d'apprentissage, et se retrouve même parfois en échec scolaire (Le Monde du 10  septembre 2003).  

A l'âge adulte, lorsqu'ils n'ont pas trouvé leur voie, les surdoués peuvent végéter, et vivre, selon les termes d'Arielle Adda, psychologue, "une indicible désolation intérieure". Dans un chapitre de l'ouvrage L'Enfant doué, l'intelligence réconciliée (Odile Jacob), elle décrit les sentiments d'inadaptation, d'isolement, de malaise et de frustration, résultant de l'écart entre l'image qu'ils ont d'eux-mêmes et celle que leur renvoient les autres.  

Un surdoué relégué à un poste subalterne se heurtera à ses collègues ou supérieurs hiérarchiques qui supporteront mal son esprit critique particulièrement développé, ou ses idées plus originales que les leurs. Il éprouvera des difficultés à se faire des amis et à nouer des relations affectives. Anne Bourone, de l'association Mensa France, qui regroupe des surdoués sélectionnés par des tests, évoque "des tensions à l'intérieur du couple, surtout lorsque c'est la femme qui est surdouée".  

C'est justement parmi les adhérents de Mensa âgés de plus de 65  ans qu'ont été recrutés les vingt-huit participants à l'étude sur les seniors surdoués. Ils ont répondu à un questionnaire  : l'échelle d'auto-évaluation de satisfaction de vie de Neugarten. Leurs réponses ont été confrontées à celles de 394  seniors de l'Université du troisième âge de Toulouse ayant participé à une autre étude, nommée Icare, sur "les facteurs de réussite du vieillissement" qui constatait déjà "la corrélation entre des fonctions cognitives élevées et un haut niveau de satisfaction de vie avec un vieillissement réussi".

L'échelle de Neugarten comporte treize items d'appréciation par l'individu de sa vie passée, actuelle et future. La comparaison des résultats des deux populations, Mensa et Icare, montre que le bilan du passé est plus positif pour les seniors surdoués  : ils sont 71,4  % à estimer que la vie les a comblés, contre seulement 39,3  % des autres retraités. Pour le présent, ils sont 78,6  % à se trouver "aussi heureux que lorsqu'ils étaient jeunes" (contre 45,7  % de la population Icare). En revanche, ils ne sont plus que 17,8  % à penser qu'ils vivent les meilleures années de la vie (contre 46,4  % des sujets Icare). "Sans doute parce qu'ils sont plus lucides", estime Annick Bessou. Cette clairvoyance n'a pas que des avantages, car les seniors surdoués sont plus anxieux que la moyenne (25  %), et plus déprimés (14  % au lieu de 8  %).  

Néanmoins, 94  % d'entre eux ne cessent pas pour autant de faire des projets d'avenir (contre 64  % de la population Icare). L'étude conclut que "l'état de surdoué, au moins quand il est reconnu, loin d'être un facteur de fragilité, semble associé à une plus grande satisfaction de vie". En effet, seuls les participants à l'enquête qui n'avaient pas pu poursuivre leurs études affichaient un indice de satisfaction très inférieur (4 au lieu de 9) à leurs contemporains qui avaient eu une vie professionnelle réussie.  

"ÉTÉ INDIEN"  

Cette enquête porte sur un public restreint, mais ses résultats recoupent ceux d'un autre travail de grande envergure commencé en 1921 aux Etats-Unis par Lewis Madison Terman, professeur à l'université Stanford et poursuivi par ses collaborateurs et successeurs jusqu'en 1999. Il s'agit du suivi d'une cohorte de 1  528  enfants, âgés de 11  ans environ en 1921. Ces enfants dont le QI moyen était de 150 avaient conservé leurs capacités à l'âge adulte. Chez les sujets parvenus à un âge avancé (plus de 80  ans aujourd'hui), on enregistrait la même forte satisfaction de vie.  

Pour reprendre l'expression du psychologue américain Edwin Schneidman, arrivés à l'âge de la retraite, les seniors surdoués vivent un véritable "été indien". Sans doute, conclut Annick Bessou, "parce que, une fois débarrassés des contraintes d'une vie professionnelle parfois peu exaltante, ils peuvent enfin donner libre cours à leur créativité".  

 

Satisfaction de vie de 28 surdoués parvenus à 65 ans et plus, par A.  Bessou, J.  Tyrell et M.  Yziquel, J.-L. Bosson, C.  Montani, A.  Franco (La Presse médicale, 10  mai 2003, tome 32, no  16, p.  721-768, Masson). Etude de l'index de satisfaction de vie d'une population de 394 personnes âgées en bon état de santé, par T. Montemayor, P.-J. Dusset, C. Faisant (Revue de gériatrie, 1993, no  18, p.  551-556). Association Mensa: www.mensa.fr.

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