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Déclaration de Graz "Handicap et Vieillissement"

Europe

9 Juin 2006

 

Préambule

Tout au long de cette déclaration, nous utilisons le terme « Personnes handicapées vieillissantes». Les personnes handicapées représentent un groupe très diversifié, incluant des personnes avec des handicaps physiques, sensoriels, intellectuels, des difficultés de développement, des personnes ayant des problèmes de santé, mais aussi présentant des handicaps complexes et multiples, comme cela est souligné dans la Classification Internationale du Fonctionnement, du Handicap et de la Santé (OMS 2001). Ces handicaps peuvent affecter tout le cours de la vie, ou apparaître lors du vieillissement. Il est largement admis que nombre de situations de handicap, telles que décrites dans ce texte, sont dues à la société.

Lors de la construction d’une zone européenne de droits et de participation, une attention particulière devra être apportée aux citoyens handicapés âgés, de manière à leur permettre de bénéficier des mêmes opportunités dans la vie que celles offertes à leurs concitoyens.

La question du vieillissement a été reconnue comme un thème central sur l’agenda européen. Les sociétés européennes se caractérisent par une proportion croissante de personnes âgées et très âgées. Il est prévu que l’espérance de vie continue à croître pendant encore plusieurs dizaines d’années, accompagnée d’une baisse continue du taux de natalité dans la plupart des pays européens (cf. le livre vert de la Commission Européenne : « Le défi du changement démographique : une nouvelle solidarité entre les générations », (mars 2005). Nous vivons dans une société qui vieillit de plus en plus, mais qui n’est pas préparée à faire face aux besoins et aux intérêts de ce groupe de personnes, en particulier de ceux qui présentent un handicap.

Fondamentalement, on associe au vieillissement le développement ou l’acquisition de l’expérience, de la sagesse, de la compétence, ainsi que le respect. Ces développements et ces valeurs sont également valables pour les personnes handicapées. Mais le concept de vieillissement peut souvent aussi avoir des connotations négatives, telles que une santé physique et/ou des capacités cognitives déclinant, l’inactivité, la pauvreté, l’isolement et la dépendance sociale. Ceci signifie que tout en respectant le vieillissement, il faut davantage privilégier les concepts de vieillissement actif et en bonne santé. Promouvoir des perspectives positives, grâce à des stratégies actives face au vieillissement, apportera une valeur ajoutée aussi bien à l’individu qu’à la société. Nous devons aussi accepter que les personnes handicapées vieillissantes vont vers leur fin de vie et que c’est un défi particulier de s’assurer que celle-ci se déroulera dans la dignité et le respect.

Les Gouvernements doivent prendre en considération les coûts financiers associés à la prise en charge des personnes âgées : besoins croissants d’accompagnement social et de soins de santé, ainsi que l’augmentation du besoin d’accompagnement et de soin pour les personnes handicapées vieillissantes (cf le rapport spécial 1/2006 de la Commission Européenne, Affaires économiques et sociales : « L’impact du vieillissement sur la dépense publique (2004-2050) ». Ainsi vieillissement et handicap seront au cours des décades futures un test de la capacité des sociétés européennes à intégrer tous les citoyens, les notions de vie dans la société et de vie autonome en étant des éléments-clés. Au total, il s’agira de la qualité de vie des personnes dans la société et des services dont elles ont besoin. Le plus grand défi sera d’arriver à identifier et à répondre aux besoins globaux de toutes les personnes âgées handicapées ou non, tout en mettant l’accent sur et en répondant aux besoins très spécifiques et diversifiés de chaque individu du groupe.

Parmi les personnes âgées en général, on peut identifier deux groupes qui nécessitent une attention spéciale en termes de politique publique, systèmes d’aide et respect des droits – la Déclaration de Graz concerne tout particulièrement ces deux groupes.

Premièrement, les personnes déficientes intellectuelles : elles jouissent aujourd’hui d’une espérance de vie semblable à celle de la population générale, mais ne sont pas prises en compte dans la plupart des programmes, stratégies ou statistiques, que ce soit au niveau européen ou national. L’accompagnement des citoyens déficients intellectuels est souvent peu voire pas développé du tout en matière de vieillissement. La législation des différents Etats membres présente des lacunes importantes s’agissant de l’émergence de groupes de personnes handicapées vieillissantes, comme les personnes déficientes intellectuelles.

Deuxièmement, de nombreuses personnes âgées deviennent dépendantes à la fin de leur vie, souvent à la suite de pertes de capacités fonctionnelles dues à l’âge. Beaucoup d’entre ceux-là auront sans doute besoin de soins de nursing pendant leurs dernières années.

Pour ces deux groupes, il faut aussi tenir compte du nombre croissant de personnes handicapées vieillissantes qui vivent dans une dépendance mutuelle avec des membres de leur famille eux-mêmes âgés.

Il y a probablement des différences entre ces deux groupes en termes de besoins et d’aides nécessaires, ainsi que des différences entre eux et la population âgée en général, toile de fond souvent négligée et que la Déclaration de Graz souligne ici

En outre, les politiques publiques tendent à se focaliser sur la question de la prise en charge, en oubliant les nécessaires réformes pour développer des mécanismes facilitant la participation et l’autonomie. Sans une législation faisant disparaître les obstacles en matière de biens et services, sans un marché du travail plus ouvert, avec des mesures d’aménagement de l’environnement de travail ainsi que de maintien dans l’emploi, la société ne pourra pas répondre aux défis qui se présentent.

Au final, peu a été fait pour favoriser l’émergence d’une économie des seniors, qui mettrait en évidence à la fois le poids économique des dépenses dues à l’âge mais aussi le potentiel de contribution des citoyens âgés à la marche de l’économie.

En tant que société, l’Europe n’en est qu’au début d’un processus d’apprentissage des effets de l’âge. Le défi fondamental est de passer d’un Etat-providence à une société du bien-être, en développant des structures et une organisation permettant à chacun, qu’il soit handicapé sa vie durant ou seulement à cause de l’âge, d’avoir les mêmes chances de participer, grâce à des politiques favorisant la participation sociale et un accompagnement adéquat : ce sont là les points les plus importants pour la qualité de vie des personnes handicapées vieillissantes.



Les participants

à la Conférence européenne sur « Handicap et Vieillissement » qui s’est tenue à Graz, en Autriche, représentant les divers acteurs aussi bien du champ du handicap que des personnes âgées :

• Personnes avec des handicaps physique, sensoriel ou intellectuel,

• Personnes âgées,

• Familles et professionnels,

• Prestataires de services,

• Pouvoirs publics,

• Décideurs politiques,

• Chercheurs,

• Professionnels de santé

a) défendent une conception positive du vieillissement, vu comme une performance et une avancée tant sur le plan individuel que pour la société ;

b) affirment que les personnes handicapées vieillissantes doivent jouir de tous les droits et libertés fondamentaux énoncés dans la « Charte des Nations Unies » de 1948, et tels qu’ils sont repris dans de nombreuses autres déclarations et conventions internationales ;

c) confirment l’importance des principes et règles politiques contenus dans les « Règles Standards des Nations-Unies pour l’Egalisation des Chances pour les Personnes Handicapées » (1993) ainsi que celle des « Principes des Nations-Unies pour les Personnes Agées » (1991), qui mettent en avant les principes d’autonomie, de participation, d’accompagnement, d’épanouissement personnel et de dignité « de manière à « mieux vivre l’allongement de la vie » (UN, 1992) ;

d) confirment la diversité des personnes handicapées ainsi que celle des personnes âgées handicapées ;

e) font référence au « Traité d’Amsterdam » (1997), qui développe le concept de citoyenneté dans l’Union européenne et renforce les garanties contre les discriminations (article 13) ;

f) sont attentifs au fait que selon la « Charte européenne des Droits fondamentaux » (2000) toute discrimination basée sur l’âge ou le handicap est interdite par l’article 21 et, en conséquence, est une violation de la dignité de la personne humaine, et sont attentifs au droit des personnes âgées et des personnes handicapées à bénéficier de mesures adaptées pour assurer leur autonomie et leur permettre de participer à la vie sociale (articles 25 et 26) ;

g) réaffirment le principe « Rien nous concernant sans nous » destiné à s’assurer que les politiques et les mesures affectant les personnes handicapées ne peuvent pas être décidées sans leur participation et leur consultation.

1) Déclarent

a) que toutes les personnes handicapées vieillissantes sont des citoyens à part entière, titulaires de droits qu’ils exercent dans le respect de leurs choix et de leurs différences ;

b) qu’il faut promouvoir une culture d’autonomie, de dignité, du choix et du respect pour les personnes handicapées vieillissantes ;

c) que toutes les personnes handicapées vieillissantes ont le même droit que tout un chacun de prendre elles-mêmes les décisions qui les concernent ;

d) qu’elles sont présumées capables de faire ces choix et de prendre leurs décisions ;

e) qu’une aide doit être apportée à ceux dont la capacité à exprimer leurs choix et leurs décisions est limitée, pour leur permettre de le faire. Il est essentiel que cette aide respecte la volonté et les souhaits de la personne, sans l’influencer ;

f) qu’il est inacceptable que les personnes handicapées vieillissantes continuent à rencontrer des obstacles pour leurs activités et la pleine participation à la vie sociale ;

g) qu’il est inacceptable qu’un nombre significatif de personnes handicapées vieillissantes vivent sans respect pour leur dignité dans des structures d’hébergement inappropriées, contraignantes, isolées et non centrées sur les besoins individuels, sans égards pour leur volonté, leurs préférences, leurs besoins et leurs droits ;

h) être très inquiets sur un risque élevé de discriminations multiples et aggravées envers les personnes handicapées vieillissantes, telles que l’exclusion sociale, la marginalisation, la pauvreté, des négligences, ainsi que des violations de droits et des abus ;

i) que les personnes handicapées vieillissantes ont le même droit que la population générale à des programmes favorisant la santé et la prévention des maladies, aux soins de santé, ainsi qu’à des systèmes d’aide adaptés, permettant une meilleure qualité de vie et facilitant ainsi un vieillissement positif et une pleine participation à la vie sociale ;

j) qu’il est essentiel de respecter les droits humains ainsi que les droits civiques dans la vie quotidienne des personnes handicapées vieillissantes ;

k) que les mesures d’aide à domicile et favorisant la vie autonome doivent être privilégiées et que les hébergements ségrégatifs (c-a-d les institutions où l’on ne respecte pas les choix des personnes) doivent être remplacés par de petites unités de vie intégrées, encourageant la participation sociale et la citoyenneté, grâce à une stimulation adaptée et à la réforme des systèmes de protection sociale ;

l) que les personnes âgées, les personnes handicapées et les familles doivent participer à la définition des politiques ;

m) que les professionnels ainsi que les aidants familiaux doivent être consultés sur leurs besoins pour l’accompagnement des personnes handicapées vieillissantes ;

n) que le dialogue entre tous les acteurs ( personnes handicapées, familles, prestataires, décideurs politiques, chercheurs) doit être favorisé à tous les niveaux par les Pouvoirs publics.

2) Décident

a) de promouvoir une approche positive des personnes handicapées vieillissantes permettant de les renforcer ;

b) de défendre les droits humains et civiques des personnes handicapées vieillissantes très vulnérables ;

c) de renforcer l’insertion et la participation en aidant les personnes à agir elles-mêmes, et en respectant et aidant les réseaux sociaux et familiaux existants ;

d) de défendre les besoins des personnes handicapées vieillissantes dans toutes les politiques et les stratégies mises en place, mais en même temps de défendre la prise en compte des besoins spécifiques de cette population par des politiques et des texte spécifiques sur certains points (méthode à double approche) ;

e) de défendre une approche basée sur les droits de l’homme et centrée sur la personne, tenant compte des besoins et des préférences individuels dans la planification, le développement, le financement et l’évaluation des services fournis ;

f) de demander la mise en place avec les moyens nécessaires de services de proximité et que la vie intégrée dans la société soit développée pour remplacer tous les hébergements ségrégatifs.


3) Recommandent

3.1. à la Commission Européenne

a) de produire, dans un livre vert, un cadre pour le développement de normes relatives à l’aide et aux conditions de vie des personnes handicapées vieillissantes. Ce livre vert devrait couvrir des domaines tels que la vie dans la société, accès aux soins et aux services sociaux, les obstacles à l’emploi, le désign universel, l’e-participation, aussi bien que les questions relatives au vieillissement et à la fin de vie dans la dignité ;

b) de prendre ces questions en considération dans le cadre de la méthode ouverte de coordination en œuvre pour la protection sociale ;

c) de développer une vaste législation contre la discrimination sur la base du handicap et de l’âge dans tous les domaines de la politique européenne ;

d) de viser, dans le développement de la législation relative au marché intérieur et aux transports, les obstacles en matière d’accès aux biens et services ;

3.2. aux Etats membres

a) de développer des aides pour les personnes handicapées vieillissantes leur assurant une égale participation à la vie en société, et de viser à ce que les services aient suffisamment de moyens, soient accessibles, disponibles et adaptables, y compris les services de santé (Charte européenne des Droits Fondamentaux, art.21, 25, 26 et 35) ;

b) de prendre l’approche des droits de l’Homme et centrée sur la personne pour permettre aux personnes handicapées vieillissantes de vivre dans et participer à la vie de leur environnement ;

c) de remplacer peu à peu tous les lieux ségrégatifs par des hébergements de proximité individuels ou en petits groupes, et par une aide aux personnes handicapées vieillissantes vivant dans leur famille ;

d) de développer des programmes spécifiques de promotion de la santé et prévention des maladies pour les personnes handicapées vieillissantes ;

e) de faire participer activement les personnes handicapées vieillissantes et leur famille dans des systèmes de management de la qualité basés sur les résultats pour les personnes ;

f) de développer les modes de défense/représentation des personnes existant, ainsi que de nouveaux modes, indépendants, neutres, pour répondre spécifiquement aux besoins individuels des personnes handicapées vieillissantes qui ne peuvent parler pour elles-mêmes et ne disposent pas d’un réseau social informel d’aide (ex. famille) ;

g) d’activement anticiper et développer des aides spécifiques pour les personnes handicapées vieillissantes vivant avec des aidants familiaux ;

h) de s’assurer que la législation nationale encourage et reconnaît le besoin d’une aide à l’information et à la prise de décision pour les personnes handicapées vieillissantes, et de changer les systèmes se substituant à la personne pour la prise de décision et lui enlevant sa capacité juridique ;

i) d’inclure tous les acteurs, à savoir : personnes handicapées, familles, prestataires de services sociaux, planificateurs et chercheurs, dans la définition des politiques et des cadres d’aides et d’accompagnement ;

j) de développer, pour les professionnels et les autres aidants, des programmes d’éducation formelle, de formation et d’information sur les questions du vieillissement et du handicap (connaissances, attitudes et valeurs), y compris sous l’angle des droits de l’Homme et de la citoyenneté ;

k) de reconnaître, encourager et récompenser les solutions informelles d’accompagnement social en leur offrant un cadre attractif ;

l) d’encourager et investir dans la recherche à la fois fondamentale et appliquée (approche holistique), y compris sur les technologies d’assistance et les nouvelles technologies relatives aux handicaps dus à l’âge, ainsi qu’aux effets du vieillissement sur les personnes handicapées, avec des stratégies de financement à la fois public et privé ;

3.3. aux divers acteurs sociaux et civils

a) de développer les existantes ou de nouvelles structures sociales pour veiller au maintien des droits et des libertés fondamentales des personnes handicapées vieillissantes ;

b) de promouvoir la collaboration entre tous les acteurs dans les champs à la fois du handicap et des personnes âgées ;

3.4. aux organisations nationales et internationales

a) de disséminer largement les principes de la Déclaration de Graz et de faire connaître aux administrations et Pouvoirs publics nationaux et régionaux leur adhésion à celle-ci ;

b) de faire connaître au Président de la Commission Européenne leur soutien à la présente déclaration.
 


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