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La discrimination par l'âge, une pratique bien ancrée 

Le Monde

France

12 Mai 2008

Christine Lagarde a eu raison de peser ses mots. Le 18 avril, en visite à Rabat (Maroc), la ministre de l'économie, confirmant l'intention du gouvernement de repousser l'âge qui autorise un chômeur - aujourd'hui 57 ans et demi - à ne plus chercher un emploi, a expliqué qu'un senior devait "pouvoir chercher du travail". "Pouvoir chercher" est l'expression juste : "trouver" aurait été bien présomptueux. Il y a loin, en effet, entre les ambitions affichées d'un pays et de ses acteurs - pouvoirs publics, syndicats, patronat - qui considèrent à l'unisson l'emploi des seniors comme une priorité nationale... et la réalité des pratiques sur le marché du travail. 

Les chiffres parlent d'eux-mêmes. Dans les années 1970, 73 % des Français quinquagénaires exerçaient une activité, en 2006, ils ne sont plus que 38 % environ. Entre-temps, le premier choc pétrolier de 1973 et l'apparition du chômage de masse ont sévi. Dès le début des années 1980, un consensus social se crée autour d'une gestion de l'emploi par les âges et de la cessation anticipée d'activité avec la mise en préretraite : syndicats et direction des ressources humaines (DRH) y voient là - et les salariés y sont souvent favorables - la purge la plus indolore. C'est le début d'une logique mortifère qui se poursuit toujours.

"CALIBRAGE ANTHROPOLOGIQUE"

Aujourd'hui, on est embauché vers 25 ans et on est débauché à 58 ans, en moyenne. Les mesures (de gauche ou de droite) ont beau se succéder depuis des années, la situation n'évolue pas. 15 % des demandeurs d'emploi ont plus de 50 ans (284 700) et ils restent inscrits (en moyenne) près d'un an à l'Agence nationale pour l'emploi (ANPE). Et ce pourcentage ne prend pas en compte les plus de 57 ans et demi dispensés de recherche d'emploi qui sont près de 380 000 ! Plus personne aujourd'hui n'ose parler du contrat à durée déterminée (CDD) senior négocié par les partenaires sociaux et mis en place par le gouvernement Villepin en août 2006. D'une durée maximale de dix-huit mois, renouvelable une fois, il était censé ouvrir les portes des entreprises aux anciens... ; en réalité, c'est un "bide" complet, dont le dernier bilan fin 2007 faisait état de quelques dizaines de contrats signés...

Existerait-il une malédiction qui frapperait la France et la Belgique, les plus mauvais élèves de l'Union européenne ? "Il n'y a absolument rien de mystérieux à tous ces résultats, s'étonne Jean-Pierre Vermes, président de VMS France, cabinet de chasse de têtes. Tout le monde sait très bien que c'est un problème de coût du travail. Les salariés âgés sont ceux qui ont les salaires les plus élevés en raison de l'ancienneté. Décidées à maintenir leur compétitivité, les entreprises ne sont pas prêtes à faire du "social" envers les seniors au détriment de leurs performances économiques." La messe est dite. Trop chers, peu motivés, rigides, forte résistance au changement..., voilà le "calibrage anthropologique" - pour reprendre une expression de Stéphane Bellini, chercheur à l'Institut d'administration des entreprises (IAE) de Poitiers - des DRH vis-à-vis des seniors dont on ne sait plus très bien où placer l'âge plancher : 45 ans ? 50 ans ? "Actuellement, on est vieux de plus en plus jeune, constate Christophe Dagues, directeur associé de Quintecia, cabinet spécialisé dans le recrutement des seniors. A quelques exceptions près, les mentalités des chefs d'entreprise sont figées. Bien sûr, une énorme majorité des DRH disent trouver scandaleuse la situation actuelle, mais quand vous leur présentez un candidat aux tempes un peu grises, combien vont l'accepter ? Une petite, petite, minorité". "Il faut aussi compter, explique Anne Saüt, directrice générale de Diversity Conseil, cabinet en ressources humaines, sur la résistance des 30-35 ans qui n'ont aucune envie de se retrouver à manager quelqu'un qui a vingt ans de plus qu'eux." Autant de préjugés - qu'il s'agisse de la fatigue, de la non-adaptation, etc. - que nombre d'études et de recherches battent en brèche, exception faite, bien sûr, de la question de la santé pour les métiers à forte pénibilité. Dans ces conditions, comment ne pas penser que la suppression, d'ici à 2013, de la dispense de recherche d'emploi va grossir les rangs des chômeurs en fin de droits qui, ensuite, ne toucheront plus que les minima sociaux ? Sans même parler de l'allongement de la vie active, destinée à équilibrer les comptes du régime de retraite...

Malgré tout, un petit espoir semble pointer. "On commence à voir les mentalités un peu bouger, estime Mme Saüt. Le vieillissement démographique, la pénurie de compétences et surtout la peur du gendarme - en l'occurrence la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité (Halde) - incitent les DRH à mettre en place des mécanismes de maintien dans l'emploi." Adaptation des postes, bilans de compétences, sensibilisation des managers aux bienfaits de l'intergénérationnel, beaucoup d'entreprises font des efforts. Mais il s'agit surtout de dispositifs de maintien dans l'emploi. Recruter les seniors au chômage est une autre paire de manches. Le gouvernement en est du coup à évoquer aujourd'hui un système de bonus-malus basé sur le taux d'emploi des seniors dans une entreprise. La réponse ne s'est pas fait attendre. René Buisson, président de la commission protection sociale du Medef a expliqué que cette démarche serait une grave erreur, précisant que "le Medef était prêt à s'impliquer et à prendre des engagements forts". Peut-on encore y croire ? 


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