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France
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Sept syndicats mobilisent contre le "désenchantement hospitalier"

By Claire Guélaud, Le Monde

January 21, 2004
 

 

Pour la seconde fois en six semaines, les personnels hospitaliers sont invités à se mobiliser, jeudi 22  janvier, en faveur de l'hôpital public et de ses missions, à l'appel de quatre fédérations syndicales de la santé et de trois syndicats médicaux, préoccupés, disent-ils, par "la dégradation permanente des conditions de travail" et par "la réduction continue de l'offre de soins". Il faut remonter à une quinzaine d'années pour trouver pareille démarche unitaire dans un milieu où les clivages entre médecins et non médecins restent forts.

La CGT, FO, SUD et la CFTC, majoritaires dans la fonction publique hospitalière, l'Intersyndicat national des praticiens hospitaliers (INPH), la Confédération des hôpitaux généraux (CHG) et la Coordination médicale hospitalière (CMH), qui représentent ensemble les trois quarts des médecins, ont pris le risque de lancer une nouvelle journée d'actions et de grèves, après un premier rendez-vous manqué, le 16  décembre 2003. Hasard du calendrier, elle est programmée le jour où le Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance-maladie doit boucler son rapport.

De l'avis des organisateurs, qui faisaient preuve d'une grande prudence, mardi soir, cette journée revêtira des formes variées  : délégations auprès des pouvoirs publics (DDASS, agences régionales de l'hospitalisation, etc.) ou des élus, assemblées générales, arrêts de travail limités, grèves plus "dures", pouvant aller jusqu'à la fermeture des blocs opératoires... "Nous sommes au début d'un processus de mobilisation", analyse le Dr Rachel Bocher, présidente de l'INPH, tandis que le secrétaire général de la fédération Force ouvrière de la santé, Jean-Marie Bellot, fait état, non sans humour, d'une mobilisation "relativement bonne" des appareils syndicaux "sans révolution sur le terrain".

Les hôpitaux publics se trouvent, en réalité, dans une situation singulière. La réduction du temps de travail - l'entrée en vigueur des 35  heures, sans création d'emplois ni réorganisation du travail suffisantes  ; l'application aux médecins hospitaliers de la semaine de 48  heures et l'intégration des gardes dans leur temps de travail - ne pouvait guère plus mal tomber. Elle s'est produite au moment où commençaient à apparaître les pénuries de personnels soignants (infirmiers, masseurs-kinésithérapeutes, etc.) et médicaux.

Malgré les crédits consentis par l'Etat pour permettre une application souple des 35  heures (compte épargne-temps, etc.) et le relèvement du numerus clausus, dont les effets dans le temps sont décalés, la tension sur les effectifs est devenue un problème majeur. Le "désenchantement hospitalier", que René Couanau, président de la mission d'information parlementaire sur l'organisation interne de l'hôpital et député (UMP) d'Ille-et-Vilaine, avait décrit dans un rapport publié en mars  2003, semble plus vif que jamais, alors même que la collectivité nationale n'a jamais autant dépensé pour sa santé et, singulièrement, pour le système hospitalier.

"Ce n'est pas Hôpital  2007 -le plan gouvernemental- qui nous inquiète. C'est Hôpital  2004", résume Nadine Prigent (CGT), soulignant le contraste entre, d'une part, "  le sentiment de ras-le-bol et la lassitude" qui prévalent actuellement dans nombre d'établissements et, d'autre part, l'engagement pris par le ministre de la santé de rénover et de réformer l'hôpital d'ici la fin du quinquennat.

RÉVOLTE ET REPLI

Le désarroi ambiant, pointé par tous, engendre des comportements opposés  : la révolte et le repli. "Certains salariés ne pensent plus qu'à leurs jours de RTT", relève, désabusé, un syndicaliste. A l'inverse, la fièvre monte dans les hôpitaux touchés de plein fouet par les restructurations  : les 39  établissements de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP)  ; certains centres hospitaliers régionaux (notamment celui d'Orléans) et de nombreux hôpitaux généraux, qui redoutent de faire les frais de la réforme budgétaire et de la tarification à l'activité (T2A).

S'ils prévoient de "grosses différences"d'un département à l'autre, les syndicats s'attendaient, mardi soir, à une mobilisation assez nette à Paris, en Bretagne (Finistère et Ille-et-Vilaine), dans le Nord et le Pas-de-Calais, dans les Bouches-du-Rhône mais aussi à Lyon, Toulouse, Bordeaux, Caen et Angers. En règle générale, ils faisaient état d'une mobilisation plus forte des médecins hospitaliers, urgentistes en tête, que des personnels non médicaux. "Ceux qui exercent des disciplines cliniques comme la pédiatrie, la psychiatrie ou la gériatrie ont tendance à être plus réactifs que ceux qui ont des spécialités plus techniques, comme la chirurgie ou la radiologie", analyse le Dr  Rocher. "Plus sensibilisés au lien social, ils s'inquiètent davantage des conséquences concrètes de la mise en place de la tarification à l'activité et des risques de concurrence accrue entre le public et le privé", ajoute-t-elle. Ils sont aussi très préoccupés par la difficulté à assurer la relève. Le 16  octobre 2003, dans une lettre ouverte à M. Mattei, 58 professeurs des universités-praticiens hospitaliers (PU-PH) avaient tiré la sonnette d'alarme. Ils ont été rejoints depuis par 186  collègues.

 

Gouvernance  : les points-clés de la réforme

Il a fallu six mois à Jean-François Mattei pour boucler la réforme de l'organisation interne de l'hôpital, rejetée par la majorité des syndicats, mais approuvée par la CFDT, l'UNSA, la CMH - pourtant partie prenante à la journée de jeudi sur la question des effectifs - et le Syndicat national des médecins, chirurgiens, pharmaciens et biologistes des hôpitaux publics (SNAM). Des pôles d'activité regroupant des services doivent être mis en place dans chaque établissement avant le début de 2007. La représentation des usagers au conseil d'administration est renforcée et un conseil exécutif, composé à parité de médecins et de l'encadrement, est créé pour piloter le système. Sauf en psychiatrie, les chefs de service, inscrits sur une liste nationale d'aptitude par le ministre de la santé, seront nommés sur décision conjointe du directeur et du président de la commission médicale d'établissement.

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