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Les ONG en guerre contre le laboratoire Novartis

Par Yves Mamou, Le Monde

Monde

25 Janvier 2007


Le 29 janvier, devant la Haute Cour de justice de Madras (Inde), un singulier procès va opposer les avocats du laboratoire pharmaceutique suisse Novartis, troisième mondial, aux défenseurs de l'Etat Indien. Ce procès est la conséquence d'une plainte déposée par Novartis le 7 août 2006, à la suite du refus des autorités indiennes de breveter une formule améliorée (cristalline bêta) du Glivec, un médicament contre une forme rare de cancer.

Ce procès, qui aurait pu n'intéresser que les spécialistes du droit de la propriété intellectuelle, réveille les passions. En novembre 2006, l'organisation non gouvernementale (ONG) Oxfam International a organisé l'envoi de 40 000 courriers électroniques à Daniel Vasella, PDG de Novartis, l'accusant de vouloir brider l'accès des pays pauvres aux médicaments.

En France, Médecins sans frontières a lancé une pétition pour demander à Novartis de retirer sa plainte. "Une victoire du laboratoire pharmaceutique créerait une situation d'apartheid sanitaire", a affirmé Médecins sans frontières, mercredi 24 janvier, au cours d'une conférence de presse.

Novartis rétorque qu'il dépense 750 millions de dollars par an (577 millions d'euros) dans des actions sanitaires contre la lèpre, la tuberculose, le paludisme et qu'il fait don du Glivec aux malades insolvables d'Afrique et d'Asie.

Le laboratoire suisse est conscient que sa plainte en justice peut être assimilée à la désastreuse action collective - à laquelle il avait participé - menée en 2001 par 39 laboratoires contre l'Afrique du Sud, qui avait entrepris de "génériquer" les antirétroviraux contre le sida.

URGENCE SANITAIRE

Le laboratoire suisse campe ferme sur sa position et tente de dissocier le dossier de l'accès des pays pauvres aux médicaments de la bagarre qu'il mène contre la loi indienne sur les brevets.

Selon Novartis, c'est la transposition dans la législation indienne, début 2005, des règles de l'Organisation mondiale du commerce ( OMC ) sur la propriété intellectuelle, qui pose problème. Certes, en adhérant à l' OMC , l'Inde a considérablement renforcé la protection des brevets sur son territoire. Toutefois, des dispositions empêchent encore la brevetabilité de molécules améliorées. Ou, comme le dit Médecins sans frontières, l'Inde a conservé un "garde-fou" qui donne aux laboratoires de ce pays le droit de fabriquer des génériques de médicaments brevetés partout ailleurs dans le reste du monde.

Voila vingt ans, un conflit de ce type serait resté local. En 2007, l'enjeu est planétaire, car l'Inde a développé une industrie pharmaceutique qui se positionne au quatrième rang mondial par le volume. Et ses génériques ont les mêmes standards de qualité qu'en Europe. Les laboratoires Natco, Cipla et Sun fabriquent différentes formules du Glivec et les exportent dans des pays tels que le Pérou, le Chili, le Guatemala, la République dominicaine, la Turquie, l'Argentine, le Venezuela, la Colombie et l'Uruguay.

Le docteur Jean-Hervé Bradol, président de Médecin sans frontières, est sensible à l'argumentation de Novartis : "Nous sommes l'avocat du laboratoire indien Cipla sur cette affaire ? Peut-être, mais demain je serai aussi bien l'avocat de Novartis ou de Sanofi-Aventis avec qui nous mènerons des campagnes humanitaires."

M. Bradol estime que les accords internationaux, qui permettent à un Etat en urgence sanitaire d'autoriser un générique d'un médicament sous brevet, ne fonctionnent pas. Le mécanisme serait trop lourd. En revanche, l'action sanitaire urgente demeure possible si les laboratoires indiens conservent leur droit de copie : "Sans eux, il serait impossible de faire baisser les prix. Quand un laboratoire américain vend un médicament 1 000 dollars et qu'il nous fait un prix d'ami à 150 dollars, c'est encore trop cher. Les fabricants de génériques indiens nous le font à 15 dollars."

Pour M. Bradol, les laboratoires européens et américains ne travaillent pas non plus à l'amélioration de la galénique : "Nous avons pu agir en Afrique contre le sida parce que Cipla a mis au point un antirétroviral en deux prises", contre six ou sept auparavant.

L' OMC est pour l'instant absente de la confrontation. L'organisation internationale ne peut être saisie que par un Etat. Or la Suisse, pour l'instant, ne bouge pas.

Le débat n'est pas que Nord contre Sud, il est aussi Sud-Sud. En Inde, la commission Mashelkar, du nom de l'ex-président du Conseil pour la recherche et l'industrie, a publié un rapport en janvier qui recommande au gouvernement d'autoriser la brevetabilité de médicaments qui, comme le Glivec, font l'objet d'améliorations progressives. Le 21 janvier, Ramesh Adige, directeur exécutif de Rambaxy, le plus grand laboratoire indien, a pris fait et cause pour les conclusions de ce rapport : "Les innovations, même minimes, devraient être brevetables." Une pierre jetée dans le jardin de Cipla, son concurrent direct ?


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