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Les jeunes doivent-ils payer la dépendance des personnes âgées ?

Par Manuel Plisson, Le Monde 

22 Novembre 2011

  France




De plus en plus discutée, mais toujours repoussée, la réforme de l'assurance dépendance apparaît année après année comme le serpent de mer de l'agenda politique. L'assurance doit-elle être obligatoire ou volontaire ? Doit-elle être publique ou privée ? La réponse à ces questions renvoie en réalité à des problématiques encore plus fondamentales touchant à la fiscalité et aux inégalités intergénérationnelles. En effet, quelle que soit la formule institutionnelle retenue, il faudra inéluctablement répondre à la question : qui paie ? C'est pourquoi, dans un pays où l'âge de l'électeur médian est proche de 46 ans, la réforme de la dépendance apparaît pour de nombreux décideurs politiques comme un piège électoral. Cette question mérite pourtant d'être au cœur des débats de la prochaine élection présidentielle.
Choisir l'assurance dépendance obligatoire publique nécessiterait une nouvelle ressource via une nouvelle taxe ou la suppression de certains niches fiscales ce qui revient in fine au même. Privilégier l'assurance dépendance privée obligatoire impliquerait de financer le coût de transition du système actuel vers le nouveau système et de subventionner la souscription des plus démunis. Une assurance obligatoire, qu'elle soit privée ou publique, aura donc nécessairement un coût collectif. La réforme de la dépendance ne peut dès lors s'affranchir d'un débat sur la fiscalité.



Par-delà le débat public/privé, plusieurs pistes ont été évoquées ou appliquées jusqu'à présent afin de financer la dépendance, comme le jour de travail supplémentaire le Lundi de Pentecôte ou la possibilité d'augmenter la CSG. Toutes ces palliatifs consistent à taxer les actifs plutôt que les retraités.

Or plusieurs chercheurs ont montré qu'il existait en France un fort déséquilibre dans la répartition des richesses en faveur des seniors. La dette financière qui a été multiplié par 5 depuis 1980 constitue un formidable transfert des richesses des "jeunes" vers les "vieux". La taxation plus lourde des revenus du travail par rapport aux revenus du capital ou de l'immobilier est également défavorable aux jeunes générations. Ce déséquilibre est accentué par une forte redistribution des pouvoirs publics en faveur des seniors. Les plus de 60 ans ne représentent que 20 % de la population mais perçoivent l'équivalent de 15 % du PIB via les transferts intergénérationnels alors que le 80 % restant (les moins de 60 ans) ne bénéficie que de 20 % du PIB. L'ensemble de ces dispositifs assurent aux seniors français un des plus hauts niveaux de vie relatif au sein des pays de l'OCDE. Les inégalités intergénérationnelles sont également manifestes en ce qui concerne les patrimoines. Les Français héritent en effet de plus en plus tard. L'âge de l'héritier moyen est de 50 ans en France. Cet effet qui s'ajoute aux effets précédemment évoqués, conduit à une concentration des patrimoines au sein des catégories les plus âgés. Les mesures fiscales récentes ont allégé l'impôt sur les successions, ce qui a encore renforcé cette concentration des patrimoines.

Le poids électoral des seniors, certainement plus important que leur poids démographique, a pour l'instant dissuadé les politiques de revenir sur ces mesures. Financer la dépendance en taxant les "jeunes" actifs ne ferait cependant qu'accentuer ces disparités inter-générationnelles. La réforme de la dépendance est peut-être l'occasion de rééquilibrer ces disparités.

Plusieurs pistes sont envisageables : aligner la CSG des retraités sur celle des actifs, taxer davantage les plus-values immobilières qui profitent en moyenne davantage au plus âgées qu'aux plus jeunes ou rééquilibrer la fiscalité du patrimoine sur celle du travail. Le débat sur le financement de la dépendance conduit également à se réinterroger sur la taxation sur les successions. Une mesure possible serait de privilégier fiscalement les donations vers les plus jeunes plutôt que de privilégier la fiscalité sur l'héritage. Ce type de ponction inciterait à un transfert du patrimoine vers les petits enfants et non uniquement vers les enfants âgés. Les jeunes pourraient donc hériter plus tôt, de leurs grands-parent. Ces réceptions précoces faciliteraient les projets des enfants bénéficiaires comme la création d'entreprise ou l'acquisition du logement.

Car le problème que pose le financement de la dépendance n'est pas tant le problème des seniors d'aujourd'hui que celui des jeunes actifs qui seront les contributeurs de demain.

En effet, si les jeunes disposent d'un fort niveau d'éducation, d'une productivité élevée et d'emplois stables, ils pourront financer la dépendance de leurs parents, que ce soit par des transferts publics ou privés. Si en revanche, les jeunes sont en situation de précarité voire d'exclusion du marché du travail comme c'est le cas pour près de 23 % des 18-25 ans aujourd'hui, ils auront toutes les peines du monde dans les prochaines années à financer la dépendance de leurs parents. C'est pourquoi, par solidarité ou par intérêt, les dépendants de demain ont intérêt à ce que les jeunes actifs d'aujourd'hui soient placés dans des conditions qui leur permettent d'exploiter au mieux leur talent et leur productivité. Le destin des dépendants de demain est en effet étroitement lié à celui des jeunes d'aujourd'hui.



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