back

 L'Union demande à la France de réformer ses retraites


By: Arnaud Leparmentier et Virginie Malingre
Le Monde, February 13, 2002


Le conseil des ministres des finances estime "indispensable" que Paris et Madrid revoient rapidement les systèmes existants. L'Italie et la Grande-Bretagne reçoivent un satisfecit des Quinze

"LE CONSEIL considère qu'il est indispensable que la France poursuive dès que possible la réforme du système de retraite". C'est ainsi que se termine l'avis des Quinze adopté, mardi 12 février, à Bruxelles sur le programme de stabilité de la France pour la période 2003-2005.

En théorie, Bruxelles n'a pas à se prononcer sur les retraites qui relèvent des choix des Etats. Mais au nom de l'euro, les ministres des finances des Quinze estiment nécessaire de surveiller ce qui se passe chez leurs voisins. Les enjeux financiers des retraites, qui n'apparaissent pas dans les budgets des Etats, dépassent de loin les querelles sur quelques dixièmes de point de dérapage budgétaire. Faute d'action, c'est la stabilité de la monnaie qui sera menacée. "A partir de 2008, il va falloir commencer à mettre des picaillons de côté", estime un diplomate. En réunion, Laurent Fabius a convenu qu'il faudrait avancer sur le sujet.

La France est visée, car depuis la réforme Balladur de 1993, qui allongeait notamment la durée de cotisation dans le privé de 37,5 ans à 40 ans, aucune réforme n'a été engagée. Lorsque le gouvernement d'Alain Juppé a voulu réformer en 1995 le régime favorable dont bénéficient les fonctionnaires et agents publics, il a mis la France dans la rue.

Quant à Lionel Jospin, à Matignon depuis juin 1997, il s'est contenté, tout comme les Espagnols, eux aussi fortement épinglés par Bruxelles pour leur manque de réformes, de créer un fonds qui doit être abondé pour faire face, à terme, au problème des retraites. Il s'agit du Fonds de réserve des retraites (F2R), créé en 1999, qui devrait être doté de 12 milliards d'euros à la fin 2002 et de 152 milliards d'euros à l'horizon 2020.

A l'approche des élections, le sujet refait surface. Le 5 décembre sur France 2, M. Jospin a tenu à se justifier : jusqu'ici, a-t-il expliqué, il n'était pas possible d'ouvrir le dossier "plombé par le gouvernement Juppé, qui avait mis des centaines de milliers de personnes dans la rue en s'attaquant inconsidérément aux régimes de retraites dits spéciaux".

Le premier ministre a promis de prendre "à bras le corps, dès la prochaine législature, et dès le début de la législature, ce dossier des retraites".

Sur TF1 le 11 février, Jacques Chirac a estimé que les retraites sont l'"un des plus graves problèmes qui n'aient pas été résolus et qui se posent aujourd'hui". Mais son intervention est restée timide alors que certains s'attendaient à ce qu'il soit plus offensif sur le sujet.

La droite milite pour un troisième étage de retraite, assis sur la capitalisation, en plus des versements de la Sécurité sociale et des caisses complémentaires. Elle assure qu'il ne s'agit pas de remettre en cause le système de répartition à la française alors que la faillite d'Enron — où les salariés ont perdu leurs retraites — jette une ombre sur la fiabilité des fonds de pension.

La gauche est d'autant plus discrète qu'elle sait qu'elle ne pourra pas aborder le sujet des retraites sans parler du régime des fonctionnaires dont la durée de cotisations (37,5 ans) est inférieure à celle des salariés du privé (40 ans).

Comparée à ses partenaires européens, la France a l'avantage d'avoir une démographie favorable, contrairement à des pays à faible natalité, comme l'Espagne, l'Italie et l'Allemagne. C'est ce qui peut expliquer que M. Jospin ait déclaré qu'"on a du temps devant nous, dix à quinze ans".

Comparée à ses voisins, la France conserve un âge légal de départ en retraite à 60 ans. Mais l'âge réel d'arrêt d'activité y est très bas, le taux d'activité des 55-64 ans étant de huit points inférieurs à la moyenne communautaire. Par ailleurs, le poids des retraites des fonctionnaires dans le produit intérieur brut est de deux point supérieur à la moyenne communautaire.

Enfin, la France n'a pas rééquilibré son système de retraite en introduisant des fonds de pension, contrairement à l'Allemagne, dont la réforme est qualifiée par les Quinze de "pas dans la bonne direction". "Mais, précisent les ministres, elle doit être complétée par des réformes structurelles destinées à accroître le taux d'activité des femmes et des travailleurs âgés", et ce le plus rapidement possible, pour faire face au vieillissement de la population.

En évaluant les programmes de chaque pays, Bruxelles a distribué de bons et mauvais points. Si, à côté de l'Espagne et la France, la Grèce se fait tancer pour n'avoir prévu "aucun plan ou aucune date spécifique pour une réforme des retraites", l'Italie a droit à un encouragement pour avoir commencé à se pencher sur ses problèmes. "Le conseil encourage l'Italie à accélérer la mise en œuvre de la réforme des retraites pour contrôler les dépenses et à promouvoir des retraites privées complémentaires".

Quant au Royaume-Uni, dont les retraites sont financées par fonds de pension et dont le ratio inactif sur inactif sera un des plus bas en 2050, il a droit à un satisfecit : "Avec un ratio de dette sur le produit intérieur brut bas et en baisse, il est en bonne position pour traiter les conséquences du vieillissement de la population", se réjouissent les Quinze.

 


FAIR USE NOTICE: This page contains copyrighted material the use of which has not been specifically authorized by the copyright owner. Global Action on Aging distributes this material without profit to those who have expressed a prior interest in receiving the included information for research and educational purposes. We believe this constitutes a fair use of any such copyrighted material as provided for in 17 U.S.C § 107. If you wish to use copyrighted material from this site for purposes of your own that go beyond fair use, you must obtain permission from the copyright owner.