Les personnes âgées d'origine haïtienne unilingue créole et analphabètes sont une proie facile pour les malfaiteurs, révèlent une étude réalisée par le Centre haïtien de regroupement et d'intégration à la société canadienne et québécoise (CHRISOCQ) portant sur la «sécurité des aînés d'origine haïtienne de RDP et la prévention de la violence et de la criminalité auprès de jeunes québécois de deuxième génération». Ces personnes sont souvent les plus grandes victimes de la criminalité, commise souvent par des membres de leurs propres familles.

«Ces personnes ont vécu la plus grande partie de leur vie en Haïti. Elles sont venues ici pour retrouver un fils ou une fille et plusieurs d'entre elles vivent des situations d'isolement social important parce qu'elles ont été obligées de quitter la maison de leur enfant, explique Alix Joseph, instigateur de l'étude. Leurs ressources financières sont extrêment limitées, poursuit-il, et leur réseau social se limite à peu de choses.» 

L'étude révèle également que la notion d'insécurité n'est pas la même pour ces gens que pour la majorité des Québécois. En Haïti, l'insécurité est institutionnelle (police, armée, milices). Des institutions souvent très opressantes qui font en sorte qu'ici, les personnes âgées d'origine haïtienne se sentent en sécurité. Leurs fortes convictions religieuses les confrontent également au fait que Dieu les protège. 

Les résultats de l'étude démontrent que les principaux actes d'agression commis à l'endroit de ces personnes sont la fraude par télémarketing, l'intimidation, les vols de sacs à main, les agressions dans les transports en commun et les vols par effraction. La peur, l'isolement et la réclusion résultent de ces actes, trop souvent commis par des membres de la famille, nés ici. 

«Les jeunes qui sont nés ici, les jeunes de deuxième génération comme on les appelle, n'ont pas le même type de respect pour les grands-parents que leurs parents en raison de l'éloignement des familles», d'affirmer M. Joseph. 

L'étude mise sur pied en décembre 2002 et dont les résultats ont été rendus public en mars dernier a également permis de déterminer que les agresseurs proviennent généralement de milieux socioéconomiques défavorisés. Ils se tiennent pour la plupart en gang et leurs prédispositions à la violence sont annoncées dans bien des cas par la consommation de drogue, le décrochage scolaire, la marginalisation et la recherche de satisfaction immédiate des besoins. 

Des pistes de solutions 

Ces résultats pour le moins inquiétants démontrent qu'il y a un manque réel de ressources pour les personnes haïtiennes de RDP, qui représente pourtant 15 % de la population prairivoise. 

La deuxième étape de l'étude sera justement de mettre en place un comité de travail qui se chargera de monter un plan d'action pour pallier la problématique. Ce comité agira à la fois pour mieux outiller les personnes âgées d'origine haïtienne à faire face à la réalité d'ici et pour éduquer et sensibiliser les jeunes face à la problématique. 

Mentionnons que l'étude a été réalisée avec la collaboration de nombreuses organisations du secteur, dont le CLSC, le poste de quartier 45, la Maison des jeunes, Intervention de soirée, le Centre des femmes haïtiennes, les jeunes d'origine haïtienne et bien d'autres. 
Peu avant la présentation de cette étude à la communauté, le député de Honoré-Mercier (anciennement Anjou-Rivière-des-Prairies), Yvon Charbonneau annonçait une subvention du gouvernement fédéral, par le biais de son programme Stratégie nationale pour la prévention du crime, de 21 000 $ au CHRISCOQ pour la réalisation de l'étude. Un autre montant d'argent devrait s'ajouter dans le futur pour la mise sur pied du plan d'action qui nécessitera encore une fois la concertation du milieu sur la question.