Le Canada
supprime l'âge légal de
départ à la retraite
Par Ludovic Hirtzmann, Le Figaro
23 Décembre 2011
Canada
Une décision visant à lutter
contre la pénurie de main-d'œuvre et
à assurer des pensions plus
élevées aux retraités.
«C'est une victoire en matière de
droits de la personne. Nous ne venons pas au
monde avec une date estampillée sur le
corps qui correspondrait à la
disparition de nos aptitudes au travail le
jour de notre 65e anniversaire.» David
Langtry, président de la Commission des
droits de la personne, n'a pas caché sa
joie à l'annonce par le gouvernement de
la suppression de l'âge de départ
obligatoire à la retraite. Les
Canadiens ont toujours été
réticents aux normes fixées par
le législateur pour choisir le moment
de prendre leur retraite. «La
discrimination fondée sur l'âge
est une forme de discrimination pure et
simple», explique David Langtry. Toutes
les provinces canadiennes, à
l'exception de quelques milliers de
salariés du secteur public du
Nouveau-Brunswick, ont donc aboli le
départ obligatoire à la
retraite.
Désormais, les fonctionnaires et les
employés des entreprises sous
compétence fédérale
pourront partir en retraite à 70 ans ou
plus tard, s'ils le souhaitent. À la
pointe du mouvement, les pilotes d'Air Canada
se sont opposés pendant des
années à l'obligation de partir
à 60 ans. «Ceux qui souhaitent
demeurer sur le marché du travail
doivent pouvoir le faire aussi longtemps
qu'ils le veulent», a annoncé le
gouvernement conservateur pour justifier une
décision plutôt bien
acceptée par la population.
Déficit de 26 milliards
En effet, le Canada fait face à une
pénurie de main-d'œuvre et garder les
plus âgés au travail est une
solution pour pallier ce manque. Ottawa a
aussi mis en place des incitations pour que
les seniors prennent leur retraite plus tard.
Les travailleurs qui s'arrêteront
à 70 ans au lieu de 65 ans toucheront
42 % de plus de la part du Canadian Pension
Plan, la retraite publique.
Comme ces allocations de retraite
versées par l'État sont
très faibles, cotiser à un fonds
de pension est la seule alternative
raisonnable, mais elle n'est pas la
panacée. La majorité des
Canadiens n'épargnent pas suffisamment,
soit par négligence ou parce qu'ils ne
le peuvent pas. La décision d'Ottawa de
supprimer l'âge de la retraite
obligatoire intervient d'ailleurs au moment
où les fonds de pension sont de plus en
plus déficitaires. Au seul
Québec, le déficit global de ces
régimes privés est de 26
milliards de dollars quand certains sont
même parfois en faillite. Un machiniste
québécois, Jean-Jacques
Piché, dont le fonds de pension a
été liquidé après
la faillite de son ex-entreprise, s'est
récemment indigné dans une
longue lettre ouverte publiée par les
médias québécois:
«J'ai pris ma retraite en 2003. En 2010,
les revenus de ma pension ont
été réduits de 40
%.»
Pour que les retraités ne
pâtissent plus des erreurs de gestion,
la Cour suprême du Canada étudie
la possibilité qu'ils deviennent des
créanciers prioritaires pour leurs
régimes de retraites, lors de la
faillite d'une société. Une
bonne nouvelle puisque, jusqu'ici, les
retraités ont souvent été
servis après les actionnaires.
Quant à la suppression de la retraite
obligatoire, la plupart des experts estiment
que cela n'amènera pas les Canadiens
à demeurer actifs plus longtemps. Ces
derniers s'arrêtent de travailler en
moyenne à 61,5 ans et à 60 ans
au Québec, une province où il
n'existe plus de retraite obligatoire depuis…
1982!
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