Fin de la dispense de recherche d'emploi
pour les seniors
Par J-C Slovar, Marianne 2
4 Janvier 2012
France
Si de l'Elysée, au gouvernement, en
passant par l'UMP, on ne jure, ces derniers
jours que par le sommet social, dont le
Président et Xavier Bertrand nous ont
déjà donné les grandes
lignes, on notera leur extrême
discrétion sur l'application de l'un
des volets de la loi n° 2008-758 du 1er
août 2008 : la suppression à
compter du 1er janvier 2012 de la dispense de
recherche d'emploi pour les chômeurs
âgés.
Il faut dire qu'avec des chiffres du
chômage calamiteux, il valait mieux
éviter de rappeler les propos «
enthousiastes », tenus par la
majorité UMP en juillet 2008 à
l'Assemblée nationale, où on
évoquait pêle mêle : la
définition de l’offre raisonnable
d’emploi, le franc succès de la fusion
ANPE/Assedic et la radiation des
chômeurs.
L'UMP glissait, à cette occasion, un
amendement visant : « (...) à
relever progressivement l’âge
d’accès à la dispense de
recherche d’emploi, jusqu’à la
supprimer définitivement en 2012,
conformément à la politique
d’augmentation du taux d’emploi des seniors
(...) » Il était soutenu et
justifié par Laurent Wauquiez : «
(...) il faut en finir avec l’hypocrisie en
matière d’emploi des seniors : la
dispense de recherche d’emploi a permis de les
expulser du marché de l’emploi, donc
d’améliorer les statistiques du
chômage, et elle a été
pour les employeurs un instrument commode de
gestion des ressources humaines (...) le
relèvement du seuil doit être
progressif, et s’accompagner de la
montée en puissance de l’accompagnement
personnalisé des seniors (...) »
Sans oublier le très
célèbre : « A 57 ans et
demi on n'est pas fichu, on peut retrouver un
emploi (...) donc, on continue à
rechercher et le service public de l'emploi
devra mettre sur la table des instruments
très spécifiques de formation,
de mise à niveau, d'aide à la
recherche » de Christine Lagarde.
Or, à fin 2011, si la rupture
conventionnelle était devenue le
premier « instrument commode de gestion
des ressources humaines » pour se
séparer des seniors, force était
de constater l'échec de
l'accompagnement de ceux-ci, dans la mesure
où ils représentaient plus de
800 000 des 5 201 300 inscrits à
Pôle emploi.
Tout chômeur ayant dépassé
les 55 ans, tel votre serviteur, pourrait vous
narrer pendant des heures, les mines
affligées des conseillers de Pôle
Emploi lors de votre inscription, la quasi
impossibilité d'obtenir une formation
de longue durée nécessaire
à un recyclage, ainsi que la diminution
de la durée des entretiens au fil des
mois. Ce à quoi il faut ajouter
l'absence systématique de
réponse des entreprises aux
candidatures seniors sur les annonces qu'elles
publient sur le site de Pôle Emploi.
C'est pourquoi, il n'était pas
scandaleux que des chômeurs de plus de
57 ans soient dispensés de recherche
active d'emploi en contrepartie de leurs
indemnités. Mais, c'était sans
compter sur la conjonction du passage de
l'âge légal de la retraite
à 62 ans et la décision prise en
2008 de supprimer la dispense.
Concrètement, que va t-il se passer
pour les chômeurs âgés dont
aucune entreprise ne souhaite s'encombrer ?
Et bien, ils vont être obligés de
: « (...) justifier de l’accomplissement
d’actes positifs et
répétés en vue de
retrouver un emploi, de créer ou de
reprendre une entreprise (...) » Et bien
entendu, de ne pas pouvoir : « (...)
sans motif légitime, refuser à
deux reprises une ORE (offre raisonnable
d’emploi) »
Or, qui peut croire, comme l'écrit
Michel Abhervé : « (...) que les
services de Pôle emploi, alors qu’ils
accueillent ces derniers temps des demandeurs
d’emploi toujours plus nombreux (...) auront
la possibilité d’assurer à ces
demandeurs un accompagnement renforcé,
alors que les perspectives de retour à
l’emploi sont bien faibles, et que les seniors
sont la catégorie où le
chômage augmente le plus, + 15 % en un
an (...) »
Maurad Rhabi, en charge des questions de
l'emploi et du chômage à la CGT,
craint à juste titre autant : «
l'impact psychologique »
représenté par la pression de
Pôle Emploi pour leur faire rechercher
des emplois « qui n'existent pas »
que l'obligation d'accepter, sous peine de
radiation, la précarité des sous
emplois ou micro boulots de quelques heures
La solution consisterait bien entendu à
revenir sur une loi qui ne tient pas compte de
la réalité de la crise actuelle
de l'emploi. Mais à quelques mois de
l'échéance
présidentielle, il semble que pour le
Président le terme social soit plus
associé à celui de TVA
qu'à celui de quelques milliers de
chômeurs soumis à une situation
encore plus anxiogène !
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