Invité de
l'émission "Capital", dimanche 18 mars,
Nicolas Sarkozy a avancé une mesure
volontariste pour lutter contre le
chômage des seniors. "Je propose
l'exonération de charges sociales pour
l'embauche de chômeurs de plus de 55 ans
qui obtiennent un CDI ou un CDD de plus de six
mois", a avancé le candidat. Le but ?
Favoriser l'emploi des seniors, que les
employeurs rechignent souvent à
embaucher parce qu'ils ont des salaires plus
élevés en moyenne, du fait de
leur ancienneté notamment.
La promesse ressemble pourtant beaucoup
à un article de loi de la
réforme des retraites de 2010 qui n'est
jamais entré en application... faute de
publication d'un décret. A l'occasion
de la réforme, le gouvernement
introduit en effet une disposition qui
prévoit que "les employeurs (...)
perçoivent sur leur demande une aide
à l'embauche, en contrat à
durée indéterminée ou
à durée déterminée
d'au moins six mois, de demandeurs d'emploi
âgés de cinquante-cinq ans ou
plus".
UN DISPOSITIF
QUI N'A JAMAIS VU LE JOUR
Le 23 mars 2011, Les Echos
révèlent en effet que le
gouvernement a renoncé à cette
mesure. A la place, il met en place une aide
de 2 000 euros pour chaque embauche d'une
personne de plus de 45 ans en contrat de
professionalisation. "Ce dispositif est plus
large" que celui qui était prévu
dans la loi sur les retraites "puisqu'il
concerne les demandeurs d'emploi de 45 ans et
plus" et met l'accent sur "la formation" via
les contrats en alternance, fait-on alors
valoir au ministère du travail.
Cette aide, dont aucun bilan chiffré
n'est encore disponible, ne ressemble pourtant
pas à ce qui était initialement
prévu dans le projet de loi.
L'étude d'impact du projet promettait
que "l'aide, d'une durée de douze mois,
serait proportionnelle, à hauteur de 14
% du salaire brut, dans la limite d'une
assiette limitée au plafond de la
sécurité sociale" (soit un
salaire de référence de 3031
euros brut maximum par mois). Le texte voyait
même 35 000 personnes concernées
par an, pour une dépense totale de 55
millions d'euros. Rien à voir avec ce
qui a finalement été mis en
place : seules 4 300 personnes de plus de 45
ans ont été embauchées en
contrat de professionnalisation en 2011.
RETOUR AU
PROJET INITIAL
Dimanche soir, les détails
donnés par Nathalie
Kosciusko-Morizet, la porte-parole de Nicolas
Sarkozy, après l'émission
laissent d'ailleurs entendre que le candidat
voulait revenir à ce qui était
initialement prévu. L'aide sera
"limitée au plafond de la
sécurité sociale, soit 36 000
euros de salaire brut par an" a ainsi
expliqué la porte-parole. Seule nuance,
l'aide désormais proposée sera
d'une durée "permanente" et non
limitée à un an.
"Le dispositif coûtera 100 millions
d'euros la première année et
bénéficiera à 50 000
à 60 000 personnes par an",
précise-t-on au Monde lundi dans
l'équipe de campagne de M. Sarkozy,
sous couvert d'anonymat, en soutenant que "si
le décret n'a jamais vu le jour, c'est
parce que les partenaires sociaux n'ont jamais
ouvert la discussion sur l'emploi des
seniors".
POLÉMIQUE
AVEC LE PS
François Hollande n'a en tout cas pas
manqué de railler ce qu'il estime
être un retour en arrière, lundi
matin, sur France Info. "Nicolas Sarkozy en
est arrivé à une forme
d'improvisation permanente, d'actes de
contrition et presque de concours
Lépine. Chaque jour, il sort une
proposition", a lancé le candidat PS en
se moquant une mesure "jamais
appliquée". De son coté,
Jérôme Cahuzac, chargé de
la fiscalité dans l'équipe de
campagne du candidat socialiste twittait un
lien vers un rapport de députés
UMP qui se félicitaient de l'abandon de
la mesure en juillet 2011.
Démonstration par l'UMP de
l'inefficacité de la mesure de
suppression des cotisations +55ans. Rapport de
l'AN p45 bit.ly/qbCrd4
Jérôme Cahuzac (@J_Cahuzac) Mars
19, 2012
"Si vos
rapporteurs comprennent les critiques
formulées à l'encontre du
dispositif, en particulier le risque d'effet
d'aubaine, ils s'étonnent que le
gouvernement s'en rende compte après la
promulgation de la loi, alors même que
le dispositif figurait dans le projet de loi
déposé par le gouvernement",
critiquaient les deux députés
dans leur rapport. Comme toutes les mesures
d'exonérations de charges, celle-ci
était en effet accusée de
pouvoir bénéficier à des
employeurs qui auraient de toute façon
recruté, ce qui constitue un "effet
d'aubaine".
"La mesure que Nicolas Sarkozy propose
aujourd'hui ne comportera pas de tel effet",
assure-t-on aujourd'hui dans l'équipe
de campagne du candidat UMP, en retournant la
critique à son adversaire socialiste et
ses "contrats de génération"
(mesure proposant de réduire les
charges d'un emploi occupé par un
senior en écange de l'embauche d'un
jeune) : ces contrats "aideront les employeurs
de tous les seniors en emploi, et pas
seulement ceux qui embauchent des
chômeurs".