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Vieillir avec le
sida, nouveau défi pour les malades
Par Hannah Dreier, Agence France Presse
29 mai 2011
Etats-Unis
Vieillir avec
le sida... Pour une génération contaminée dans les
années 1980 et 90, ce n'était pas prévu.
Aujourd'hui, l'âge venant et sans le sou, beaucoup d'entre eux
multiplient les problèmes de santé.
Le sida a failli tuer Lou Grosso il y a 30 ans. Mais cet
Américain n'était pas préparé au dernier
diagnostic de son médecin: il souffre de problèmes
cardiaques. A 57 ans, Lou a également des douleurs aux
articulations et des pertes de mémoire. Or, sur les 14
gélules qu'il avale par jour, trois seulement ciblent sa
séropositivité.
"Je dis toujours à mes médecins: vous vous
inquiétez pour le VIH mais je vais mourir d'une crise
cardiaque", explique-t-il à l'AFP. "Ca me tracasse, j'ai une vie
agréable, je n'ai pas envie d'y passer parce que mon corps pense
que j'ai 80 ans", poursuit-il.
Tandis que l'attention - et l'argent - s'est portée ces
dernières années sur les ravages de
l'épidémie en Afrique, les spécialistes sont
préoccupés par cette nouvelle crise du VIH.
Depuis quinze ans que les anti-rétroviraux et la
trithérapie sont apparus, une première
génération de personnes porteuses de la maladie y a
survécu et vieillit. Leurs complications de santé sont
inédites, de même que les effets psychologiques à
long terme de la maladie et les problèmes financiers qu'ils ne
s'attendaient pas à avoir le temps de rencontrer.
Lou Grosso, qui a programmé les premiers logiciels informatiques
grand public dans les années 80, n'en revient pas d'avoir
vécu suffisamment longtemps pour apprendre à concevoir
des sites internet. Mais il s'inquiète que son esprit soit moins
vif, avec des pertes de la mémoire immédiate.
Une étude récente a montré que 52% des
Américains séropositifs souffraient de troubles
cognitifs, contre 10% chez les séronégatifs.
Les patients porteurs du VIH âgés de 55 ans risquent aussi
trois fois plus de souffrir d'une maladie chronique, comme
l'ostéoporose, le diabète ou encore le cancer, que les
personnes non séropositives âgées de 70 ans, selon
une étude de l'American academy of HIV medecine.
Dans les premiers temps de l'épidémie, les patients
mouraient très jeunes dans le service du Dr Brad Hare à
l'Hôpital général de San Francisco, qui soigne Lou
Grosso. Aujourd'hui, plus d'un quart des patients contaminés ont
plus de 50 ans, selon le Centre de contrôle et de
prévention des maladies (CDC) et l'âge moyen des 3.000
patients suivis par le service du Dr Hare est de 47 ans.
"Les patients disent que ça les épuise: on lutte contre
le VIH pendant 30 ans, on parvient à le maîtriser et une
nouvelle cascade de problèmes médicaux arrive", explique
le médecin.
Les scientifiques commencent seulement à se pencher sur la
provenance de ces nouveaux problèmes médicaux, pour
déterminer s'ils sont liés à la maladie
elle-même, aux médicaments ou s'ils ne sont que des
signaux naturels de l'âge.
Mais le combat de ceux qui vieillissent avec le sida ne s'arrête
pas aux complications purement médicales. Les médecins
s'inquiètent aussi pour des patients comme Vicky Davidson qui,
minée par un long hiver de solitude, a failli, à 64 ans,
abandonner son traitement anti-VIH.
Contaminée en 1986 lors d'une transfusion sanguine, elle a subi
deux opérations chirurgicales à la hanche à 50 ans
et souffre de fatigue chronique. Mais ce qui la démoralise le
plus, c'est son isolement social.
"Je ne veux pas que les gens pensent que je suis une pleurnicheuse,
alors je fais comme si ce n'était pas grand chose, mais dans mes
moments de solitude, je voudrais bien avoir un compagnon",
confie-t-elle.
La question financière est également cruciale pour ceux
qui n'espéraient pas vivre si vieux. Ainsi Homer Hobi, 65 ans,
raconte à l'AFP avoir récemment repris un emploi dans une
agence immobilière. Dans les années 90, il avait
laissé sa maison, son entreprise et une bonne part de ses
économies à son ex-femme, malgré les protestations
de l'avocat chargé de son divorce.
"Pas un seul médecin à qui j'ai parlé à
l'époque n'envisageait que je serai encore en vie 10 ans plus
tard...", justifie-t-il.
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