La maladie d'Alzheimer - Un lourd fardeau pour la famille
Par Samira Hamrouni, La Presse.tn
14 Janvier 2009
Tunisia
En Tunisie, la population âgée de 65 ans et plus ne cesse de croître et la proportion des personnes âgées de 60 ans et plus est passée de 4.1 % en 1956 à 9.6 % en 2004. Celle des personnes âgées de 65 ans et plus est passée de 3.5 % en 1966 à 6.5 % en 2004. Selon les estimations, cette catégorie d'âge représentera 17% en 2030. On assistera, donc, à une révolution démographique. La pyramide sera presque renversée avec une part de personnes âgées qui sera supérieure à la tranche des enfants âgés de 0 à 15 ans.
Avec cette transition que connaît la Tunisie, il va y avoir augmentation d'incidence des maladies liées à l'âge. Ces maladies sont handicapantes. La personne âgée perd son autonomie physique et mentale. La démence est l'une des pathologies neuro-dégénératives dont la fréquence augmente considérablement avec l'âge. Il s'agit, en effet, d'une affection évolutive qui conduit progressivement à la détérioration des capacités fonctionnelles, donc à la perte d'autonomie avec des troubles affectant trois domaines essentiels, notamment les activités de la vie quotidienne, le comportement et la cognition.
«Parmi les maladies dégénératives liées à l'âge figure la maladie d'Alzheimer qui est la forme la plus fréquente de la démence. Sa prévalence croît avec l'âge. Le vieillissement de la population tunisienne rend compte de l'augmentation actuelle et à venir du nombre des sujets déments. Cette maladie, terriblement invalidante, représente 70 % des démences prévalentes et les autres démences sont vasculaires ( 10%) et mixtes (20%)», a indiqué le Dr Saïd Hajem, docteur en épidémiologie, coordinateur de l'unité de recherche sur le vieillissement et les causes médicales de décès à l'Institut national de santé
publique.
La maladie d'Alzheimer est une maladie dégénérative, à évolution lente, du système nerveux central que l'on rencontre le plus souvent chez les personnes âgées. Dans la majorité des cas, la maladie se déclare autour de 70 ans. Il existe des formes précoces, débutant avant 65 ans, beaucoup plus rares, mais qui ont habituellement une évolution
rapide.
Le Dr Hajem a montré dans son étude intitulée «Présentation de la maladie d'Alzheimer :épidémiologie, physiologie, clinique et thérapeutique de la maladie» que cette maladie est caractérisée par des troubles de la mémoire et du jugement, une désorientation dans le temps et dans l'espace. Les personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer souffrent de troubles progressifs de la mémoire et du langage, de difficultés de concentration et d'orientation. Ces symptômes peuvent fréquemment être accompagnés d'un changement de la personnalité. En raison du caractère évolutif de la maladie, ces symptômes s'aggravent, généralement, au fur et à mesure que le cerveau continue de se détériorer.
Par conséquent, cette maladie constituerait dans un avenir proche un enjeu énorme et croissant du point de vue santé publique. Elle relève, en effet, d'un traitement spécifique dont les conséquences économiques et sociales sont considérables. Le coût social et humain de cette maladie est élevé. Elle n'est pas la maladie d'une seule personne puisqu'elle touche son entourage direct, ce qui est une cause supplémentaire de souffrance. L'Alzheimer dépasse, donc, le cadre médical pour concerner toute la société.
«La prise en charge du malade est lourde sur tous les plans, notamment psychologique, social, économique. La famille a du mal à vivre cette situation. L'Alzheimer est une maladie de la famille. Elle pose un lourd fardeau pour tous. Malgré la volonté des membres de la famille, la prise en charge de ces maladies devient difficile. Elle exige des technicités qui dépassent les compétences des membres de la famille. Le but est le maintien familial, mais à un point de la maladie, les familles ont besoin des aidants professionnels pour les soutenir et les soulager. Ils leur permettent de souffler», a ajouté le Dr
Hajem.
La personne âgée risque de se retrouver seule. La prise en charge demande beaucoup de temps, d'attention et de moyens. On pense aux auxiliaires sociaux pour prendre en charge les spécificités de ces malades, les accompagner à domicile et répondre adéquatement à leurs besoins. Il faut que la famille et les aidants sociaux travaillent ensemble. Le traitement de la maladie est non pharmacologique. Les personnes âgées exigent une certaine présence et une écoute.
«L'étape future est de créer des structures médicalisées pour prendre en charge ces personnes et soulager les familles. Ces agents à domicile qui ont une formation adéquate se chargent de laver, d'alimenter, de soulager le malade. Ces soins non pharmacologiques permettent à la famille de s'alléger. Ils font de telle sorte qu'il n'y ait pas de cassure dans les liens familiaux. Mais ces auxiliaires de vie sociale sont relativement chers. L'espoir est de voir un jour la Cnam inscrire dans son panier de base les frais engendrés par la perte de l'autonomie. Ainsi, l'Etat, les associations, les familles doivent apporter leur soutien pour que la maladie ne brise pas la structure de la famille», a confié notre interlocuteur.
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