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Alzheimer : Appliquer les alternatives efficaces aux neuroleptiques

Amélie Pelletier, doctissimo.fr


20 octobre 2010 

France

 

Alzhimer alternatives neuroleptiques


De nombreux patients atteints de la maladie d'Alzheimer souffrent de troubles du comportement, pouvant aller jusqu'à de l'agressivité ou des cris. Face à ces problèmes, les soignants ont longtemps eu recours à des neuroleptiques. Mais aujourd'hui, on sait que dans ce cadre, ces médicaments sont inefficaces et dangereux. D'autres prises en charge sont possibles.
En France, les malades Alzheimer sont 6 fois plus exposés aux neuroleptiques que la population du même âge, et jusqu'à 9 fois plus pour les malades en établissements. Il existe pourtant des alternatives efficaces aux neuroleptiques pour prendre en charge les troubles du comportement chez les personnes souffrant de la maladie d'Alzheimer et des pathologies apparentées. Ces techniques ne sont toutefois pas suffisamment connues et enseignées auprès des personnels des maisons de retraite, maisons médicalisées et des hôpitaux, qui continuent de prescrire massivement et à tort ces médicaments.

 

Une exposition aux neuroleptiques 6 fois plus élevée
Les troubles du comportement sont fréquents au cours de l'évolution de la maladie d'Alzheimer. Ainsi, parmi les résidents en Établissement d'Hébergement pour Personnes Âgées Dépendantes (EPHAD) ayant une maladie d'Alzheimer ou une maladie apparentée, 80 % présentent à un moment donné un trouble du comportement (25 % des troubles du comportement modérés et 10 % des troubles importants)1. Dans ce derniers cas, les patients se mettent à pousser des cris, s'agitent, deviennent agressifs, déambulent dans les couloirs des établissements… Face à cela, proches et soignants se sentent souvent démunis. Le recours aux neuroleptiques, malgré l'absence d'indication dans la prise en charge de ces troubles, est fréquent. "L'exposition aux neuroleptiques chez les patients Alzheimer est 6 fois plus élevée que dans la population saine du même âge, atteignant 18 % contre 3 %, explique le Dr Armelle Desplanques, responsable de l'unité Programmes Pilotes à la Haute Autorité de Santé (HAS)2. Or, la seule indication des neuroleptiques est le traitement des psychoses".
Jusqu'en 2005 environ, on croyait en effet que les neuroleptiques pouvaient constituer une réponse efficace à ces troubles. Mais depuis, des études ont montré que ces molécules étaient inefficaces et qu'elles exposaient les patients à des effets secondaires importants, supérieurs aux bénéfices escomptés. "Les neuroleptiques sont une mauvais réponse à une bonne question", résume Benoît Lavallart, gériatre chargé de la Mission de pilotage du Plan Alzheimer3. Ils augmentent la mortalité globale de 5 à 8 %, notamment à cause d'un plus grand risque d'accident vasculaire et surtout la sédation, avec les conséquences qu'elle entraîne : la fréquence des chutes multipliée par 8, les problèmes de communication… 


Quelles alternatives aux neuroleptiques ?
Les troubles du comportement perturbent les patients, mais également leurs proches et les soignants. Soumis par ailleurs à un stress et une surcharge de travail, ces derniers n'ont pas toujours la patience nécessaire devant un refus de soins. "Il faut introduire un peu de souplesse et leur montrer que de nouvelles techniques de soins et les approches cognitivo-comportementales ont été validées d'un point de vue scientifique", préconise le Dr Desplanques.
"Les personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer perdent souvent leurs capacités d'adaptation et ont tendance à ressentir comme une agression des choses banales", poursuit-elle. Et de prendre pour exemple la toilette, un moment très souvent mal vécu par les patients et les soignants. "Certains patients ne supportent pas l'eau. Or, on peut tout à fait faire les toilettes sans eau, avec des serviettes chaudes. On peut également modifier l'environnement et le rendre plus apaisant, en atténuant la luminosité et en assourdissant le bruit. Et pour les patients qui ne présentent pas de risque de fuguer ou de se perdre, on peut tout à fait les laisser déambuler dans les couloirs", assure la spécialiste. Même chose devant un refus de soins : finis l'autoritarisme et les techniques de contention, "il faut essayer de décaler les soins et prendre le temps de comprendre les réticences du patient", poursuit-elle.
Ces nouvelles techniques de soins visant à prévenir et gérer les troubles du comportement ont été développées en collaboration avec des médecins et des associations de patients, et mises en place grâce au Plan Alzheimer. Des études pilotes ont montré qu'une rapide formation des soignants (6 h) permettait de réduire de 60 % le nombre de chutes. Des techniques de réhabilitation ont également été développées pour préserver l'autonomie des patients en travaillant sur les capacités restantes et en fixant avec les proches les objectifs à atteindre. Résultat : les patients sont beaucoup plus autonomes et les familles beaucoup moins frustrées.


Réduire à 5 % la prescription de neuroleptiques
La Haute Autorité de Santé (HAS) a développé un programme destiné aux professionnels pour réduire les troubles associés aux neuroleptiques chez les patients Alzheimer4. Après avoir analysé les conditions de prescription de ces médicaments, l'organisme a mis au point différents outils d'amélioration : des recommandations de bonnes pratiques professionnelles, mais aussi des indicateurs à même de juger de l'impact des actions engagées pour résoudre ce problème de santé publique. Parmi ces outils d'évaluation, le programme Alerte et Maîtrise de l'Iatrogénie - AMI5 repose en particulier sur le repérage des patients sous neuroleptiques, ce qui constitue un indicateur d'alerte, et sur le nombre de prescriptions confirmées, qui témoigne de la maîtrise de la prescription."L'idée est d'inciter les professionnels de santé à réviser leurs prescriptions et de s'assurer qu'elles sont appropriées".
Au niveau national, le taux de prescription chronique des neuroleptiques chez les patients Alzheimer reste très élevé, à 16,1 % en 2008. Un taux en baisse par rapport à 2007 (16,9 %), qui pour le Dr Desplanques, constitue une "tendance encourageante" qu'il convient de confirmer et d'accentuer dans les années à venir ; Un impératif si l'on veut atteindre l'objectif ambitieux de 5 % que s'est fixé la HAS (contre 2,9 % pour la population générale âgée).



1 - Plan Alzheimer (site du ministère de la Santé).
2 - Interview du Dr Armelle Desplanques.
3 - Quelle est la problématique des neuroleptiques dans la maladie d'Alzheimer ?, Dr Benoît Lavallart, Chargé de mission Alzheimer (accessible en ligne).
4 - Dossier de presse de la HAS - Limiter la prescription de neuroleptiques dans la maladie d'Alzheimer (accessible en ligne)
5 - Programme AMI_Alzheimer (téléchargeable sur le site de la HAS).

 

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