La sexualité des personnes âgées, un tabou qui
persiste
20
minutes
11 Octobre 2011
France
Marcel a 78
ans. Sa femme Jeanne, de trois ans plus jeune, est morte il y a peu de
temps. Mais pas avant d’avoir eu le temps d’être
interviewée avec lui par M6 pour le documentaire «Les
Français, l’amour et le sexe». «Jeanne et moi avons
participé à ce documentaire pour démontrer qu’il
n’y a pas d’âge pour avoir une sexualité
épanouie», a confié Marcel au Parisien. «Ce
sujet reste tabou pour beaucoup de personnes âgées».
«Si l’on en juge par la fréquence à laquelle on
parle de la sexualité des personnes âgées par
rapport à la sexualité de toute autre personne, il est
évident qu’il y a un tabou», confirme Jérôme
Pelissier, écrivain et chercheur en psycho-gérontologie,
et auteur de Humanitude: Comprendre la vieillesse, prendre soin des
Hommes vieux. De fait, en 2007, une grande enquête menée
sur la sexualité des Français arrêtait par
exemple ses sondages à 69 ans.
Rainer Hornung, professeur de psychologie sociale et sanitaire à
l’Institut de psychologie de l’Université de Zurich, auteur du
documentaire «Vieillir et jouir sans rougir» en 2006,
expliquait à l’époque que «la sexualité de
personnes d’âge mûr et avancé, après avoir
connu une longue phase de tabouisation, n’est que très
récemment devenue un sujet de société, et de ce
fait un objet de recherche. Des thématiques telles que le
changement de normes et de comportements sexuels ont été
généralement explorées dans les populations
jeunes. Par ailleurs, la recherche sexologique est dominée par
des problématiques d’ordre clinique (exemples: absence de
libido, troubles sexuels, violence sexuelle).
«Vieux pervers, vieux cochon»
«Nous sommes sur des représentations choquantes, juge
Jérôme Pelissier. Une personne âgée qui a une
sexualité est tout de suite un vieux lubrique, un vieux cochon,
un vieux pervers. Le fait que ces mots péjoratifs soient
associés au mot vieux dans des expressions n’est pas
anodin». Cela atteste d’une répulsion des plus jeunes face
à la sexualité des plus vieux. «Evoquer la
sexualité de personnes plus âgées sous-entend
inconsciemment qu’il pourrait s’agir de nos parents, voire de nos
grands-parents, ce qui dérange», estime le
spécialiste. Il s’agit aussi d’une difficulté à
penser la vieillesse sous un autre mode que celui de la maladie, du
déclin, ou bien du vieillard sage au-dessus des
réalités sensorielles: «Dans les deux cas, ce sont
des représentations de la vieillesse loin de la
sexualité».
Une autre difficulté, propre à notre époque, est
la vision d’un monde propre et lisse, selon Jérôme
Pelissier: «Quand on parle de sexualité, on voit des tout
jeunes, tout beaux, tout lisses, tout performants. La maladie et le
handicap sont moins présents dans notre réalité
d’aujourd’hui qu’il y a 100, 200 ou 300 ans, on voudrait que la
sexualité soit parfaite, et consommée par des gens
parfaits». Un monde photoshopé. Pas évident
d’y montrer des fesses fripées.
Mais les conséquences sont réelles. «On peut se
demander si la gêne par rapport à ce sujet de la
sexualité des personnes âgées est susceptible de
complexer et de complexifier leur manière de la vivre»,
voire les conduire à une sorte d’abstinence forcée.
«Donc c’est très important qu’il y ait des
émissions qui l’abordent, et des individus qui soient
prêts à en parler».
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