Home |  Elder Rights |  Health |  Pension Watch |  Rural Aging |  Armed Conflict |  Aging Watch at the UN | Videos   

  SEARCH SUBSCRIBE  
 

Mission  |  Contact Us  |  Internships  |    

        

 

 

 

 

 

 

 




Fin de vie : la France néglige toujours ses mourants


Laetitia Clavreul, Le Monde


15 Février 2012
 
France


Les progrès de la médecine ont fait évoluer des maladies autrefois aiguës en pathologies chroniques, et ainsi accru le nombre de fins de vie lentes et complexes. La tendance devrait se poursuivre, mais la France prend mal en compte ce phénomène. C'est ce qui ressort du premier rapport de l'Observatoire national de la fin de vie, rendu public mercredi 15 février dans un contexte encore plus tendu qu'habituellement sur cette question sensible, l'euthanasie étant devenue un sujet du débat de l'élection présidentielle. François Hollande a inscrit une évolution de la loi à son programme; Nicolas Sarkozy s'y oppose.
Le rapport de l'Observatoire créé en 2010 après l'affaire Chantal Sébire, du nom de cette femme défigurée qui réclamait le droit de mourir, était attendu. Il ne comporte toutefois pas les résultats d'une étude de l'Institut national des études démographiques (INED) sur les circonstances des décès et la réalité des pratiques d'euthanasie en France, qui devrait être publiée en avril.

Le rapport mesure toutefois, et pour la première fois, les besoins en soins palliatifs: deux tiers des personnes qui décèdent relèveraient d'une telle prise en charge, soit 322 000 par an, dont la moitié sont atteintes d'un cancer. Ces patients sont loin d'en bénéficier : à l'hôpital par exemple, en soins aigus, un tiers des mourants disposerait d'une prise en charge palliative, soit seulement la moitié de ceux qui en ont besoin. Aux urgences, 64 % des personnes qui décèdent nécessiteraient des soins palliatifs et seuls 7,5 % en bénéficient. L'Observatoire regrette que le système de codage de l'activité hospitalière, qui a souvent changé, ne permette pas d'avoir une vision précise du recours à de tels soins.

Alors qu'il est communément admis que la loi Leonetti qui instaure le droit au "laisser mourir" est mal connue des Français et peu appliquée, le rapport fait le point sur la formation des soignants: à l'hôpital, depuis 2005, seulement 10 % des infirmières ont été formées. Pire, chez les médecins libéraux, seuls 2,6 % des généralistes ont opté pour une formation à l'accompagnement de la fin de vie. Et ce, alors que beaucoup de Français souhaitent mourir chez eux.

DONNÉES PEU NOMBREUSES

Dans l'attente de l'étude de l'INED, la France ne dispose d'aucune photographie fiable sur les circonstances des décès. En Belgique et aux Pays-Bas, qui ont légalisé l'euthanasie, ces données alimentent déjà le débat. Pourquoi un tel retard? "L'hypothèse que j'émets est que dans les pays du nord de l'Europe, culturellement et historiquement, la question de la mort et de la fin de vie est moins taboue", affirme Régis Aubry, président de l'Observatoire et chef du service de soins palliatifs du CHU de Besançon.

En Belgique et aux Pays-Bas, peu de décisions d'euthanasie ont été enregistrées (2,5 % à 3,5 % de l'ensemble des décès). Mais parmi elles, un tiers sont prises sans le consentement des patients, malgré une procédure stricte de décision médicale collégiale, et sont donc illégales. Un phénomène qui devrait être aussi constaté en France, estime l'Observatoire, et dont il faudra s'atteler à comprendre les causes. En octobre 2011, l'étude menée par le docteur Edouard Ferrand, chef de l'unité mobile de soins palliatifs de l'hôpital Foch à Suresnes (Hauts-de-Seine), montrait que des demandes d'euthanasie persistent malgré l'accompagnement des patients par des équipes de soins palliatifs (Le Monde du 11 octobre 2011).

L'Observatoire rend par ailleurs publique, dans son rapport, une étude réalisée sur les "obstinations déraisonnables" – ou acharnements thérapeutiques –, que la loi Leonetti proscrit depuis 2005. Il n'existe pas de données sur le nombre de situations donnant lieu à des conflits entre patients, famille et médecins, mais il ressort de cette enquête, menée par le docteur Bernard Devalois, médecin de soins palliatifs, qu'elles sont rares. Ces conflits naîtraient en outre davantage du fait d'un désaccord entre médecins et équipe paramédicale, qu'avec les patients ou leur entourage. Enfin, dans les conflits concernant des patients inconscients, des velléités d'acharnement thérapeutique ont été constatées non de la part de médecins comme on aurait pu s'y attendre, mais des familles.
Des données peu nombreuses, certes, mais à prendre en compte. "Notre rapport est fait pour alimenter le débat. Notamment pour que, quelle que soit l'orientation politique ou politicienne des candidats à la présidentielle, on puisse débattre sur des éléments factuels", espère M.Aubry, s'agaçant de voir le sujet de la fin de vie tourner à l'affrontement gauche-droite.

Rien ne laisse présager que ce travail apportera une quelconque sérénité, tant les positions semblent déjà tranchées. Dès réception du rapport, mardi 14 février, François Fillon a publié un communiqué, dans lequel il juge qu'une évolution législative n'est pas nécessaire. Dans la foulée, l'Association pour le droit de mourir dans la dignité (ADMD) a dénoncé, "un brûlot anti-euthanasie". Drôle d'ambiance.

More Information on World Health Issues 


Copyright © Global Action on Aging
Terms of Use  |  Privacy Policy  |  Contact Us