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France: Les scénarios noirs du Haut Conseil de
l'assurance-maladie Demonstrations
in June, during the reform of the pension system in France Le
haut conseil pour l'avenir de l'assurance-maladie est entré dans le vif
du sujet. Et à en croire la teneur de ses travaux sur l'évolution des dépenses
de santé ou sur la qualité du système de soins, il n'est pas sûr que
l'analyse sur laquelle il devait travailler lundi 22 décembre, toute la
journée, serve, autant qu'il aurait pu le souhaiter, les desseins du
gouvernement de Jean-Pierre Raffarin.
En
installant, à la mi-octobre, cette instance de consultation, qui doit lui
remettre un "diagnostic partagé" sur le système de santé
français le 22 ou le 23 janvier 2004, le premier ministre lui avait donné
une feuille de route (Le Monde du 15 octobre 2003). Il avait fait
remettre à ses 53 participants un document de 72 pages comportant des
"éléments de diagnostic" et évoqué, à leur intention,
"six pistes de réflexion", dont la responsabilisation
accrue des assurés. Il y est favorable, comme son ministre de la santé,
Jean-François Mattei. Mais,
après des débuts laborieux, le Haut Conseil, qui s'est trouvé une méthode
de travail, a décidé d'élargir le champ de ses réflexions. Quitte à
prendre quelques libertés avec la commande de M. Raffarin, à la
satisfaction générale de ses membres, qui craignaient parfois d'être "instrumentalisés"
par les pouvoirs publics. Et s'il confirme avec force la nécessité d'une
réforme et chiffre, pour la première fois, le besoin de financement de
la branche maladie à l'horizon de 2020 - autour de 3,2 points du PIB -,
il nuance et, parfois même, infirme certains des présupposés
gouvernementaux. Dans
un document de travail sur "Les principaux paramètres financiers et
économiques du système de santé", qui tient compte d'une première
série d'échanges à l'intérieur du Haut Conseil, son président,
Bertrand Fragonard, analyse la situation financière de
l'assurance-maladie. Et s'inscrit en faux contre la thèse, défendue par
M. Mattei, qui expliquait, lors de la présentation du budget de la Sécurité
sociale le 25 septembre : "Nous connaissons une période de
croissance plus faible. C'est la principale cause de la détérioration
des comptes." Or,
pour 2003, le Haut Conseil estime qu'"un quart du déficit de la
Caisse nationale d'assurance-maladie (CNAM) (soit 2,7 milliards d'euros)
est imputable à la conjoncture, ce qui signifie que les trois quarts du déficit
de l'assurance-maladie sont aujourd'hui d'origine structurelle."
"A partir de 2002, un écart de plus de 3 points est apparu entre la
croissance des produits et celle des charges. Le maintien d'un tel écart
au cours de trois années successives ne s'était jamais produit au cours
des vingt dernières années", précise le document travaillé
par M. Fragonard, qui est un spécialiste reconnu des questions de
protection sociale (il a travaillé dans les cabinets de Simone Veil et
dirigé notamment les caisses nationales d'assurance-maladie et
d'allocations familiales). PROJECTIONS Non
content de rappeler l'impasse financière actuelle de la Sécurité
sociale -"l'ensemble des déficits cumulés du régime général
s'élèvera ainsi à près de 49 milliards d'euros fin 2004"-, M.
Fragonard et son équipe ont esquissé des projections pour les années à
venir. En partant du déficit de 10,9 milliards d'euros retenu pour la
branche maladie dans la dernière loi de financement de la Sécu et en
retenant trois hypothèses de croissance des dépenses d'assurance-maladie
- 1 point, 1,5 point, 2 points de plus que le PIB -, ils ont élaboré
différents scénarios. Leur conviction ? "Le déficit tendanciel à
l'horizon 2010 serait compris entre 27 et 39 milliards d'euros constants
2002, et en 2020 il serait compris entre 60 et 105 milliards d'euros
constants 2002." Les
magistrats de la Cour des comptes qui travaillent avec M. Fragonard, lui-même
président de chambre dans cette institution, se sont attardés sur deux
scénarios. Dans le scénario médian, qui retient pourtant une
progression des dépenses d'assurance-maladie inférieure à son niveau
actuel, le déficit serait quand même de l'ordre de 2 points de PIB en
2013 et de 3,2 points de PIB à l'horizon 2020. Le financer supposerait,
par exemple, soit de diminuer drastiquement la prise en charge publique
des dépenses de santé (de 77 % à 55 %), soit de doubler en 2020 le taux
de la CSG. Aux mêmes dates, l'accumulation des déficits représenterait
plus de 260 milliards d'euros en 2013 (13,6 % du PIB) et 640 milliards
d'euros en 2020 (29,8 % du PIB). "Accepter un tel scénario déboucherait
très vraisemblablement sur des tensions insoutenables",
insistent les auteurs. Ils font aussi remarquer que "la pression sur
les prélèvements obligatoires serait telle qu'elle risquerait de
conduire à un effet d'éviction massif au détriment des autres
besoins collectifs", comme le logement, la dépendance ou l'éducation. L'autre
scénario, plébiscité, suppose qu'une action "méthodique et résolue"
soit entreprise "pour mieux organiser le système de soins autour
d'un meilleur rapport qualité/prix". Mais il faudra des années
pour infléchir le rythme des dépenses, et, même dans l'hypothèse d'un
retour à l'équilibre en 2010, la dette accumulée atteindrait alors 80
milliards d'euros. Le
Haut Conseil ne juge pas "pertinent d'accroître l'endettement de
l'assurance-maladie". Ce qui revient, en creux, à se prononcer
contre l'allongement de la contribution de remboursement de la dette
sociale (CRDS). Surtout, il préconise d'agir "simultanément"
dans deux domaines : "la refonte du système de soins",
sur la nécessité de laquelle il insiste beaucoup, et "le réexamen
des systèmes de recettes et de prise en charge publique". Deux
mesures ont été plus particulièrement travaillées : l'élargissement
de l'assiette de cotisation des fonctionnaires, via l'intégration de
leurs différentes primes, qui rapporterait entre 1,5 et 2 milliards
d'euros ; et l'alignement du taux de CSG des retraités et des chômeurs
sur celui des actifs, ce qui ferait rentrer 7,5 milliards dans les caisses.
Matignon, pour sa part, évalue à 3 milliards les rentrées supplémentaires
liées à l'alignement des retraités sur les actifs. Toutes
ces pistes feront l'objet, dans les prochaines semaines, d'un intense
travail de mise en forme et de réflexion. Avant la rédaction du rapport
final, qui, de l'avis de certains participants - tel Etienne Caniard,
vice-président de la Mutualité française -, devrait être suffisamment
resserré et "musclé" pour pouvoir être connu du plus
grand nombre et faire œuvre de pédagogie. Des dépenses en hausse de 6,4 % sur un an Les
dépenses de l'assurance-maladie du régime général de la Sécurité
sociale ont progressé de 6,4 % sur un an, à fin novembre, selon des
chiffres provisoires publiés par la Caisse nationale d'assurance-maladie
(CNAM), le 19 décembre. Le montant des dépenses cumulées depuis début
janvier s'élève à 91,487 milliards d'euros, selon ces chiffres en taux
corrigés des jours ouvrés. Les soins de ville (prescriptions, indemnités
journalières, honoraires des médecins et dentistes), représentant
presque la moitié des remboursements versés par la Sécu, connaissent
une croissance de 6,8 % pour un montant cumulé de 44,251 milliards
d'euros ; ils sont légèrement inférieurs à ceux d'octobre. Les dépenses
des hôpitaux publics ont progressé de 5,5 %, celles des établissements
médico-sociaux de 8,5 % et celles des cliniques privées de 7,2 %. A
l'automne 2002, le Parlement avait voté un objectif de dépenses
d'assurance-maladie de + 5,3 % pour 2003. De son côté, la commission des
comptes de la Sécurité sociale a prévu une augmentation de 6,4 %, ce
qui représente un dépassement de l'objectif de 1,2 milliard d'euros. Copyright
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