Relèvement de l’âge de la
retraite de 55 à 60 ans
Abidjan.net
13 Mars 2012
Côte d'Ivoire
Avec le
relèvement de l’âge de la retraite de
55 à 60 ans, les jeunes
diplômés sont inquiets. Cette
crainte, selon les spécialistes de la
Caisse nationale de prévoyance sociale
(Cnps), n’a pas sa raison d’être.
Les jeunes
diplômés inquiets
Siriki Y, 35 ans, a un diplôme
d’ingénieur-informaticien depuis 2005. Mais
il n’a pas encore réussi à obtenir
son premier emploi. Déprimé par sa
condition professionnelle, Siriki ‘’ se
débrouille’’ dans un cybercafé en
qualité de gérant. Pour arrondir ses
fins de mois, il monnaye son savoir en
informatique dans une grande école. Pour
cet homme, la nouvelle ordonnance adoptée
le 11 janvier 2012 en Conseil des ministres et
portant sur la réforme du régime de
retraite de la Cnps n’est pas opportune. «
Je crois que l’augmentation de l’âge de la
retraite est dommageable pour nous les jeunes sans
emplois. Le gouvernement vient de prendre une
mesure impopulaire qui nous maintient dans la
précarité professionnelle. Comment
aurons-nous du travail si les vieillards doivent
demeurer encore à leurs postes pour un
quinquennat. Nous ne sommes pas d’accord avec
cette loi qui nous ôte toute chance de
rentrer dans la vie active », proteste-t-il.
Et un autre d’ajouter : «A cet âge,
les vieux ne sont plus performants. Atteints de
sénilité, ils sont soucieux de leur
état de santé déclinant. La
mesure vient comme pour boucher toute perspective
de trouver un premier emploi pour la jeunesse dans
un contexte de chômage endémique
», soutient Jean François. Les
angoisses de Siriki et Jean François ne
sont pas des cas isolés. En effet, le
sentiment anti-vieillards se développe de
plus en plus dans le monde du travail depuis
l’entrée en vigueur de la réforme le
1er février 2012. Selon les
témoignages recueillis auprès de
nombreux jeunes sans emploi de San Pedro, les
seniors, à 55 ans, doivent céder la
place aux jeunes.
La Caisse nationale de prévoyance sociale
(Cnps), de son côté, précise
que les jeunes sans emploi ont une conception
erronée de la réforme de retraite.
Il ne s’agit pas, se défendent les
responsables de cette structure, d’instaurer un
système gérontocratique dans le
monde du travail. Selon Koffi Bouadou, directrice
de l’agence principale d’Adjamé-Abidjan,
même si la loi devrait rester en
l’état, cela n’aurait aucun impact
substantiel sur la résorption du
chômage. A l’en croire, nul ne peut lui
apporter la preuve que les employeurs recrutent
systématiquement des jeunes
diplômés pour combler les postes
laissés vacants par des travailleurs qui
font valoir leurs droits à la retraite.
«Toutes les offres d’emplois qui passent
dans les communiqués font une mention
spéciale à «
l’expérience » que doit avoir le
postulant. Puisque dans notre système
éducatif, les étudiants ne font pas
de l’étude/emploi comme c’est le cas en
Europe, ils sont toujours lésés lors
des recrutements », explique-t-elle. Puis la
présidente du comité de travail de
la réforme du régime de retraite de
poursuivre : « Les entreprises ont
trouvé des astuces pour ne pas laisser
partir leurs meilleurs éléments
atteints par la limite d’âge (55 ans). Elles
leur font signer des contrats à
durée déterminée (CDD) pour
profiter encore de leur expérience et leur
maturité. Les patrons de
société estiment que les jeunes
diplômés leur reviennent cher en
terme de formation et une fois formés ils
cherchent à se faire débaucher par
d’autres entreprises concurrentes »,
dit-elle.
L’argument massue brandi par les partisans de la
réforme de « l’assurance vieillesse
» est que de nos jours un grand nombre de
jeunes, à la recherche de leur premier
emploi, ne l’obtiennent qu’à partir de 35
à 40 ans. Pour l’experte en
sécurité sociale, ce type de
travailleurs n’aurait jamais de pension de
retraite si l’ancienne loi n’avait pas
été abrogée.
«Puisqu’ils ne peuvent pas atteindre le
nombre d’années requises à 55 ans
pour être éligibles à la
pension de retraite, la Cnps ne leur reversera
donc que des pensions d’allocations uniques. Toute
chose qui n’est pas conforme à la mission
de la Cnps. Cette caisse est faite pour ne payer
que des pensions viagères »,
confond-elle les détracteurs de la
réforme en marge d’une tournée
d’explications et d’échanges avec les
employeurs et les salariés du privé
sur la réforme le week-end dernier à
San Pedro.
Contexte de la
réforme de l’assurance vieillesse.
La révision de la loi relative à
l’assurance retraite en Côte d’Ivoire
résulte du constat fait par les dirigeants
de la Cnps. Il ressort de cette remarque que cette
branche retraite était devenue
déficitaire depuis de nombreuses
années. Selon Koffi Bouadou, cela n’est
aucunement dû à une mauvaise gestion,
mais à un déséquilibre dans
le système de fonctionnement de la Cnps. Si
cette structure voulait continuer à payer
les pensions aux assurés qui sont partis
à la retraite, elle se devait de revoir le
système en faisant une réforme ardue
pour améliorer l’application
financière de la retraite. Ainsi ! En plus
de faire relever l’âge de la retraite de 55
à 60 ans, l’ancien taux de cotisation de 8%
est passé à 12% depuis le 1er
février 2012, et il sera à 14% en
2014. Aux yeux de l’experte en
sécurité sociale, cette nouvelle
réforme est le prix à payer par les
salariés pour avoir un système de
sécurité sociale viable.
«Figurez-vous que la Cnps paye des pensions
de 1 million, de 800 milles Fcfa chaque mois. Ces
gros montants contribuent à affaiblir le
système surtout que nous étions
arrivés à un niveau où le
nombre de cotisants s’est amenuisé à
cause des crises militaro-politiques de 99, 2002,
2004, 2011. Durant ces périodes, des
entreprises fermées nous ont laissé
un flot de travailleurs qui ne payaient plus leurs
cotisations du fait de leur état de
chômeurs. Ainsi, les sorties de fonds se
sont accrues au moment où les ressources
diminuaient. Aussi la Cnps a-t-elle pu honorer ses
engagements envers les retraités ses
dernières années grâce
à ses réserves », soutient Mme
Koffi.
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