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By Claire
Guélaud, Le Monde C'est un des axes forts du constat du Haut Conseil, et celui sur lequel les
responsables politiques et syndicaux les plus réservés à l'égard des
projets gouvernementaux s'appuient déjà pour conforter leurs analyses
: la sauvegarde de l'assurance-maladie ne peut se limiter à des
ajustements financiers et elle passe par un effort "résolu"
pour obtenir un meilleur fonctionnement du système de soins, une véritable
coordination des acteurs et une plus grande information des usagers. Près de soixante ans après l'ordonnance du 4
octobre 1945 créant la Sécurité sociale, le Haut Conseil affirme
que l'assurance-maladie "ne peut plus se contenter d'être un simple
dispositif de paiement pour des soins qui s'organiseraient tout seuls".
Face à une demande de biens médicaux en constante augmentation, elle
doit être capable de faire des choix vis-à-vis d'une offre de soins
"infiniment plus riche et variée qu'autrefois", mais "sans
remettre en cause l'universalité de la couverture". Une fois posé ce double diagnostic, le Haut Conseil analyse longuement les
insuffisances et les lacunes du système tout en ouvrant des pistes de réflexion
et, parfois, de réformes sur nombre de sujets délicats
: le niveau du "panier" des biens et soins remboursables
; les assureurs qui le prendraient en charge
; les inégalités territoriales et sociales dans l'accès aux
soins ; les nouvelles formes
possibles de prise en charge. Ainsi propose-t-il de "moduler le
remboursement selon la démarche
de soins qui serait librement choisie par l'assuré". Parmi les
mesures évoquées - et appliquées en Allemagne - figure l'augmentation
du taux de remboursement pour les assurés qui ont une démarche de prévention. "Le système de financement s'épuiserait à vouloir couvrir sans aucun
tri tout ce que les industries et professions de santé peuvent offrir",
note le Haut Conseil. Il insiste sur la nécessité de hiérarchiser les
priorités et de passer "de choix implicites à des décisions
explicites et raisonnées". "A quelles pathologies, à quels
traitements et sous quelles conditions doit-on prioritairement consacrer
le financement socialisé ?",
s'interroge-t-il. Il propose trois critères de prise en charge d'un acte ou d'un produit
: la sécurité, l'efficacité, "qui s'apprécie selon des
critères objectifs élaborés et reconnus par la communauté scientifique",
et l'efficience, qui rapporte l'utilité au coût. Le Haut Conseil est
partisan d'une gestion plus "active" et plus
"critique" du périmètre des biens et services pris en charge
collectivement. Ce qui suppose, ajoute-t-il, une coordination "le
plus en amont possible" avec les organismes de couverture complémentaire
(mutuelles et assurances). Le système de soins et de remboursement n'est pas "suffisamment orienté
vers la qualité face au malade", regrette le rapport Fragonard. Il
relève, par exemple, de "graves carences" dans l'élaboration,
la diffusion et l'application effective des référentiels de bonne
pratique médicale. Il faut, estime-t-il, engager tous les professionnels
de santé libéraux ou hospitaliers dans une démarche périodique d'évaluation
de leurs pratiques, "systématiquement articulée à une offre de
formation professionnelle plus substantielle et plus indépendante, et
appuyée par des procédures d'accréditation". Au passage, les dépenses injustifiées sont épinglées. "Rien ne
justifie que l'assuré français se voit prescrire entre deux et quatre
fois plus d'analgésiques, d'antidépresseurs et de tranquillisants que
les usagers des pays voisins", note le rapport, qui préconise
d'"engager, sur ce sujet, des actions extrêmement décidées".
Tous les acteurs de la chaîne du médicament doivent y participer, "laboratoires
pharmaceutiques, prescripteurs, pharmaciens, caisses d'assurance-maladie,
organismes complémentaires et assurés sociaux eux-mêmes". "BEAUCOUP À FAIRE" L'assurance-maladie, qui a "beaucoup à faire" en matière de vérité des coûts, doit aussi "mieux utiliser ses instruments tarifaires", relève le Haut Conseil. Evoquant l'inégale répartition des praticiens libéraux sur le territoire et ses conséquences sur la consommation de soins, il recommande de "s'interroger sur le bien fondé de la totale liberté d'installation des professionnels de santé libéraux". En matière d'équipement hospitalier, il déplore "la trop grande lenteur avec laquelle les moyens sont redéployés", affirme la nécessité de poursuivre les restructurations hospitalières et plaide pour une meilleure organisation de la permanence des soins par les médecins libéraux. Le cloisonnement entre médecine de ville et hôpital reste "le plus grand obstacle à une bonne recomposition de l'offre de soins", précise le Haut Conseil, qui déplore le retard dans la généralisation d'un dossier médical partagé.
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