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Retraites : le gouvernement joue la fermeté face aux syndicats

 

By Claire Guélaud, Le Monde

 

 May 28, 2003

 

Le conseil des ministres a approuvé, mercredi 28 mai, le projet de loi sur la réforme des retraites présenté par François Fillon. Le chef de l'Etat a jugé cette réforme "juste et urgente" et a estimé que garantir la retraite par répartition est un "devoir" pour les pouvoirs publics.

 

Jacques Chirac et Jean-Pierre Raffarin n'ont pas l'intention de revenir sur le projet de loi réformant le système de retraites, qui a été adopté, mercredi 28 mai, en conseil des ministres. Après l'intervention du ministre des affaires sociales, François Fillon, le chef de l'Etat a réaffirmé que cette réforme était "nécessaire" et "juste". Il a estimé que, désormais, elle devait suivre "la voie démocratique normale au Parlement". M. Fillon avait averti les syndicats, un peu plus tôt, sur Europe 1, qu'"il ne peut pas y avoir de pressions de l'extérieur" pendant le débat parlementaire.

 

Le gouvernement met ainsi un point final à la première phase de la réforme. Pour chacun de ses protagonistes, il y a eu des moments forts, qui ne coïncident pas nécessairement avec le calendrier officiel : le lancement de la réforme, le 6 janvier 2003, par Jacques Chirac ; le discours de Jean-Pierre Raffarin au Conseil économique et social (CES),

le 3 février ; les trois mois et demi de concertation (6 février-15 mai), rythmés par des journées de mobilisation.

 

Tout commence en janvier 2002 avec la rédaction du programme de l'Union en mouvement (UEM). Le RPR François Fillon y travaille avec deux personnes. "Sur la réforme des retraites, notre démarche était très basique, se souvient un des rédacteurs, Jérôme Paolini. Elle tenait en une phrase : les socialistes ne l'ont pas faite, nous devrons la faire la première année". Cinq mois plus tard, M. Fillon se trouve dans son bureau de l'agence des Pays de la Loire, à Paris, quand il reçoit un coup de téléphone. "C'est les affaires sociales", lance-t-il, avant de lâcher ce commentaire : "Merde, il y a les retraites."

 

A peine installé rue de Grenelle, il arrête sa stratégie. Conscient de la nécessité de renouer le dialogue social, atrophié sous le gouvernement Jospin, il souhaite d'abord asseoir sa crédibilité sur certains dossiers (35 heures, loi de modernisation sociale..) avant de s'attaquer aux retraites. Il n'en démord pas, même quand les plus libéraux de la majorité lui demandent de hâter le pas et d'être plus radical.

 

MÉTHODE DÉCONCERTANTE

 

Au cœur l'été 2002, une autre partie se joue, tout aussi importante. Deux dirigeants syndicaux, Jean-Christophe Le Duigou (CGT) et Jean-Marie Toulisse (CFDT), décident d'engager un travail en commun.

Les deux hommes, qui s'apprécient, ont écrit à quatre mains un livre sur l'avenir des retraites. De là à faire travailler ensemble leurs équipes, il y avait un pas difficile à franchir. "Il a fallu le faire passer dans nos syndicats respectifs. Ce n'était pas évident", se souvient M. Toulisse. Sans cet épisode, la démarche intersyndicale n'aurait jamais vu le jour.

 

A Matignon, les choses commencent vraiment en septembre. Tous les conseillers chargés des retraites s'y retrouvent le samedi. "L'approche a été dès le départ pluridisciplinaire. Jusqu'en novembre, nous avions encore des débats sur les fonds de pension. En décembre, l'accord était général pour reconnaître le caractère crucial du problème de la

répartition", explique un participant. Au même moment, l'UMP nomme un "monsieur retraites", Xavier Bertrand, nouveau député de l'Aisne.

 

Le 6 janvier, à la traditionnelle cérémonie des vœux présidentiels aux "forces vives" de la nation, M. Chirac lance la réforme. Il en fixe les grands principes et le calendrier. "Personne n'imaginait qu'il irait aussi loin ce jour-là", confie le conseiller social de M. Raffarin, Dominique Chertier. Le même jour, sept syndicats emmenés par le tandem

CGT-CFDT adoptent leur déclaration commune et annoncent une journée d'action. Le 3 février, au Conseil économique et social, dans un discours ciselé par son directeur adjoint de cabinet, Jean-François Cirelli, et par son conseiller social, le premier ministre précise ses intentions. Ce jour-là, tout ou presque est dit. Le soir même sur TF1, M. Raffarin se dit "favorable à une harmonisation progressive" du public et du privé.

 

La concertation débute les 6 et 7 février, rue de Grenelle. Syndicats et patronat sont reçus par M. Fillon et le ministre de la fonction publique, Jean-Paul Delevoye. Du groupe confédéral en groupe technique, les réunions se succèdent à un rythme soutenu. L'ambiance est bonne, mais la méthode jugée déconcertante. A la mi-mars, sans jamais avoir réellement négocié, les ministres rendent public un premier texte. A ce moment, la question des carrières longues, évoquée par les parlementaires communistes et par ceux de la majorité, émerge. Le numéro un de la CFDT, François Chérèque, et le président de l'UMP, Alain Juppé, en discutent en tête-à-tête à l'Assemblée. Le 3 avril, une deuxième

journée de mobilisation rassemble plusieurs centaines de milliers de personnes. Signe prémonitoire, la CFDT n'en est pas. Le gouvernement est pressé. Le 18 et le 22 avril, MM. Fillon et Delevoye reçoivent à nouveau les partenaires sociaux. Officiellement, la concertation est close. En réalité, le! s syndicats vont mettre le gouvernement sous pression. Ils le font avec les manifestations du 1er et du 13 mai.

 

Le 14, au lendemain d'une mobilisation sans précédent depuis 1995, M. Fillon engage, pour la première fois, de "vraies négociations". Elles durent dix heures et s'achèvent à 4 h 30 sur un constat de désaccord. Un peu plus tard, Matignon reprend la main. François Chérèque, reçu par Jean-Pierre Raffarin, verrouille avec lui le contenu de ce qui sera peu

après, pour le leader cédétiste, un "compromis acceptable".

 

Le front syndical est rompu. Le rapprochement CGT-CFDT a vécu, même si chaque camp évite les paroles trop blessantes. M. Chérèque doit s'expliquer en interne. Bernard Thibault, contre son gré, est devenu l'interlocuteur incontournable du gouvernement. Pendant qu'une partie de ses troupes reprend, dimanche 25 mai, le slogan de "grève générale insurrectionnelle", il demande, sans succès, la réouverture de négociations. Marc Blondel fait de même. M. Fillon refuse. Dans la rue - qui "ne gouverne pas", selon M. Raffarin - la mobilisation du public reste forte. Mais le gouvernement n'a aucun scénario de sortie de crise.


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