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Mourir chez soi, un «fort désir» inassouvi

Par Anna Lietti, www.letemps.ch

14 septembre 2009


Suisse

 

(Keystone)

Alors que l’hôpital est devenu le haut lieu du mourir contemporain, la majorité des gens préféreraient finir leurs jours chez eux. Une étude belge le confirme


C’est peut-être plus important encore pour ceux qui restent que pour ceux qui s’en vont, puisque les premiers continuent à vivre avec le souvenir: on peut avoir le sentiment d’une mort bâclée, d’un énième rendez-vous manqué. Ou au contraire celui, apaisant, d’une véritable prise de congé.


C’est cette tranquillité dont témoignent les familles qui ont vécu à la maison la fin de vie d’un être cher. «Il faut se garder d’idéaliser, dit Jean-Paul Studer, médecin de famille à Peseux. Mais dans mon expérience, la mort à domicile est une aventure humaine intense et enrichissante.»


La plupart des gens aspirent à mourir dans leur lit, observent, comme lui, les professionnels sur le terrain. Pourtant, la proportion de morts à domicile, qui était de 80% il y a cent ans, s’est réduite à environ un quart, selon les estimations européenes.


Comment expliquer cet écart? Une étude menée en Belgique, et dont les résultats sont publiés ces jours-ci (1), place la communication entre médecin et patient au centre de la problématique. Tout en fournissant de précieuses données chiffrées qui confirment les observations empiriques. 


La question de départ de l’enquête belge est la suivante: dans quelle mesure les médecins de famille savent-ils où leurs patients préféreraient mourir? Il apparaît que l’information circule dans 46% des cas seulement. Mais aussi que quand le médecin connaît le souhait de son patient, ce désir parvient à une réalisation dans 80% des cas.


L’étude confirme également que la préférence des patients va, dans la majorité de cas (58%), à la mort à domicile. Vient ensuite la maison de retraite (40%), puis l’unité de soins palliatifs (6,6%). L’hôpital, pourtant haut lieu du mourir contemporain, arrive bon dernier: seules 4,7% des personnes choisiraient d’y quitter la vie.


Démographe et grand avocat de l’aide à domicile en Suisse (2), Hermann-Michel Hagmann voit dans l’enquête belge la confirmation d’une tendance: «Il y a dans la population un fort désir de mourir chez soi, plus fort probablement qu’il y a une dizaine d’années. Mais beaucoup de médecins ne le savent pas ou préfèrent ne pas le savoir.»


Une des raisons à cela est très terre à terre: comme le confirme l’étude belge, la disponibilité du médecin est déterminante dans la réussite d’un projet de mort à domicile: «Pour le patient, savoir que son médecin est atteignable jour et nuit en cas de besoin est essentiel dans ces moments», observe Jean-Paul Studer, en digne représentant de la vieille école. Or, peu nombreux sont ses jeunes confrères qui sont prêts à une telle dédition.


Mais il n’y a pas que le médecin: pour mourir chez soi, il faut aussi être soutenu par une structure d’aide et de soins à domicile efficace. Par une famille aussi si possible, mais qui a elle-même besoin d’un sérieux coup de main pour ne pas flancher: «C’est toute une chaîne d’acteurs qui est mobilisée, observe encore le praticien neuchâtelois: si un des maillons faiblit, c’est l’affolement, l’ambulance, et tout finit à l’hôpital.»


Pour Hermann-Michel Hagmann, le quartier général de cette chaîne doit être le centre local d’aide et de soins à domicile: «Chaque centre médico-social devrait développer son équipe de soins palliatifs, plaide-t-il. C’est faisable, moyennant un complément de formation du personnel déjà en place. Et un partenariat efficace avec le corps médical et les équipes spécialisées des hôpitaux.» C’est sur ce modèle que le Centre médico-social de Sierre a, sous sa direction, développé le programme pilote Juana, qui fait référence en Suisse romande mais reste une exception. 


Ici et là, d’autres choix ont été faits. Notamment celui de centres de soins palliatifs qui détachent, au besoin, leurs équipes à domicile. Mais cela suppose souvent, pour la famille, pour le mourant, une discontinuité des interlocuteurs génératrice d’angoisses et de dysfonctionnements, plaide Hermann-Michel Hagmann: «Nous sommes face à de nouvelles générations d’aînés qui tiennent à leur autonomie jusqu’au bout. C’est dans ce contexte que s’inscrit le développement des services à domicile, dont les soins palliatifs sont un aboutissement logique. Les centres médico-sociaux doivent assumer le rôle central qu’ils jouent dans cette évolution.»


Mourir chez soi redevient ainsi un projet d’avenir. Un projet largement partagé et de plus, matériellement abordable: le modèle sierrois est générateur d’économies considérables, plaide son promoteur.


Un projet, pourtant, qui reste largement inaccompli. Parce que, malgré un discours favorable à leur développement, les structures de services à domicile sont encore lacunaires. Pour que cela change, il faudrait un vrai pilote dans l’avion de la santé en Suisse, note Hermann-Michel Hagmann. Tous les regards se tournent vers Berne. 


(1) GPs’awarness of patients’ preference for place of death.
In British Journal of General Practice, 59, septembre 2009.


(2) Vieillir chez soir, c’est possible 
de Hermann- Michel Hagmann. 
Ed. Saint-Augustin, 2008. 



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