Ils vivent dans un taudis depuis
trente-deux ans
Par Valentine Rousseau, le Parisien
27 juillet 2011
France
Combien
sont-ils à vivre comme Marina et Hubert? Comment se douter qu’en
face du restaurant le plus chic et le plus cher de Meaux se terre un
couple de retraités dans 20 m2 insalubres?
Marina a 85 ans, son mari, 78 ans. Tous deux louent depuis trente-deux
ans un appartement en rez-de-chaussée dans le quartier
Saint-Nicolas pour 42 € par mois. Une somme dérisoire pour un
taudis indigne. Les mouches côtoient les cafards, la
fenêtre de la façade décrépite est
condamnée, des fils électriques courent sur les murs,
mais surtout l’habitat ne comporte ni WC ni salle d’eau!
Marina et Hubert se soulagent dans des seaux avec couvercle. « La
nuit, je sors les vider dans le regard de la cour commune, souffle
Hubert. J’ai honte, alors je fais ça discrètement pour ne
pas gêner ni être vu. »
Faute
de place pour s’allonger, il dort assis dans un fauteuil
Le couple gêne tellement peu que Michael Vaquiez a vécu
sept ans dans le même petit immeuble sans se douter de rien. Il
est devenu l’unique famille du couple, leur ange gardien. « J’ai
découvert la situation en mars, s’indigne-t-il. Si j’avais
imaginé de telles conditions de vie, je me serais soucié
d’eux plus tôt. Mais ils n’ont jamais voulu que j’entre chez eux.
Le service d’hygiène de la ville est passé il y a trois
mois. Si personne ne bouge, ils ne vont pas passer l’été.
» « Je ne reçois jamais personne, et ma femme est
restée enfermée ici pendant trois ans et demi, sans
sortir », raconte Hubert, qui a le cœur fragile. Marina a
alterné depuis plusieurs mois les séjours en
hôpital et dans son logement. Elle agrippe les mains des
visiteurs, les larmes aux yeux : « Il faut nous reloger, ne nous
abandonnez pas. C’est l’enfer ici, vraiment l’enfer. »
Une odeur insoutenable de renfermé, de moisi, se dégage
de cet espace qui est encombré de monticules d’affaires
stockées. Hubert n’a plus de place pour s’allonger, il dort
assis dans un fauteuil. Il faut dégager le fatras du lit de
Marina pour qu’elle se couche. Le retraité assure que le
propriétaire a toujours promis des travaux, sans agir. Depuis
une quinzaine d’années, il a décidé de ne plus
payer son loyer (lire encadré). Hubert porte une chemise bleu
ciel impeccable, il tient à rester propre et se lave dans
l’évier. Le couple vit reclus dans une ambiance qui
évoque les romans de George Sand
et de Zola. Lui, ancien peintre, a rejeté l’assistante sociale
de la mairie quand elle a débarqué avec la police croyant
Marina morte. « Cette dame a cru que j’avais tué ma femme
ou quoi? Je ne veux plus voir sa tête! » s’emporte le papy.
L’adjoint au maire au logement, Artur Jorge Bras, estime qu’« une
maison de retraite serait plus adaptée à la situation de
ce couple » et l’invite à recontacter le service social.
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