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"A 41 ans, je me sens vieillir"

leJDD

27 mars 2010

France

 

Christine vit avec le VIH depuis son premier raport sexuel. Vingt ans de raitements, de maladies associées, une greffe de foie... 

"Ça alors, ça fait vingt ans, et je ne l’ai même pas fêté!" Christine fait mine d’en rire, pourtant l’anniversaire n’a rien de joyeux. Vingt ans qu’elle vit avec le VIH… Rien dans son regard volontaire ne trahit ces années de combat. Mais son corps amaigri est usé. "Je me rends compte aujourd’hui, à 41 ans, de la fatigue accumulée avec le virus. Je me sens vieillir."

Christine a découvert sa séropositivité à la suite d’un examen gynécologique, en 1990. A l’époque, cette passionnée de foot joue dans la section féminine du PSG, mène une vie saine. Elle comprend qu’elle a été infectée lors de son premier rapport sexuel, quelques mois plus tôt. "Dans mon esprit, le VIH, c’était la mort : je ne serai pas prof de sport, je n’aurai pas d’enfants. Il m’a fallu quatre ans pour entendre et accepter l’annonce. Je ne sais par quel miracle j’ai fait ce chemin." 

Depuis, elle en a parcouru un autre, chaotique, au fil de l’évolution des traitements. Sous l’effet de son premier antirétroviral, l’AZT, elle voit en trois mois les muscles de ses jambes se paralyser. Premier arrêt. En 1997, elle teste une trithérapie qui l’épuise. En plus de ses dix médicaments, elle doit en ingérer d’autres pour contrer les effets secondaires. Second arrêt, pendant deux ans. "Ma priorité était de vivre ma vie. Je préférais la qualité à la quantité", dit-elle. En 2000, son médecin lui prescrit une nouvelle trithérapie. Cette fois, son corps se métamorphose: "En deux ans, j’ai pris de la graisse dans l’abdomen et les épaules. Je me masculinise. Je n’ai plus de cuisses, plus de fesses, et je ne peux rien y faire. A part mettre une prothèse!", esquive-t-elle. 

Comme elle, les patients qui vivent depuis longtemps sous l’emprise de l’infection semblent subir un vieillissement accéléré. "Grâce aux multithérapies, le virus est bien contrôlé. Mais il reste toxique et induit une inflammation persistante", explique le Pr Jacqueline Capeau, chercheur à l’Inserm, qui dirige le groupe de travail VIH et vieillissement de l’ANRS. Le système immunitaire, stimulé pendant des années, ne peut plus répondre. Apparaissent alors, chez des patients de 50 ans, des pathologies observées chez les personnes âgées, touchant les reins, le cœur, le foie, le cerveau… Depuis peu, le nombre de cancers qui ne sont pas liés directement au VIH augmente lui aussi. "On considère que ces patients anciens ont un âge physiologique de dix à quinze ans plus élevé que leur âge civil", résume Jacqueline Capeau. 

Est-ce le virus, le vieillissement ou les traitements qui causent ces complications? Sans doute une action conjuguée. Mais les plus touchés sont les malades de longue date, qui ont reçu les premiers antirétroviraux. "Certaines molécules induisent une augmentation des risques cardio-vasculaires, de l’ostéoporose, du diabète, de troubles neurocognitifs", explique le Pr Capeau. En 2004, Christine fait une hémorragie digestive. Les médecins mettront un an à poser un diagnostic: elle a une maladie rare, une hyperplasie nodulaire régénérative. "C’est la première fois en France que cette maladie était associée au VIH. Après mon cas, il y en a eu quelques autres. Tous avaient pris le même médicament. Ajouté au virus, ça a peut-être déclenché cette maladie." 

"Il paraît que ça s’apprend, la solitude" 

Le soir de Noël 2006, la jeune femme reçoit une greffe de foie. La voici contrainte d’adjoindre dix médicaments antirejet à ses antirétroviraux. Tous les trois mois, les consultations en hépatologie s’ajoutent aux rendez-vous VIH. Comment concilier cette vie avec un emploi ? Christine a choisi de quitter son travail d’agent hospitalier pour vivre avec l’allocation adulte handicapé. Son appartement parisien bénéficie d’un loyer modéré. Il lui reste 400 euros pour vivre chaque mois. "Je ne pars pas aux Bahamas tous les ans ! Mais cela me permet d’aménager mon emploi du temps. Et je n’ai pas l’impression de duper l’Etat, vu que je suis bénévole à temps plein." 

Pour montrer que le virus peut toucher tout le monde, Christine a longtemps travaillé au Kiosque, une association de prévention. Aujourd’hui, elle milite au collectif associatif Femmes et VIH. Elle s’active aussi à l’association Trans-Forme, qui fait la promotion du don d’organes par le sport. Depuis 2004, elle ne joue plus au PSG. Mais l’an dernier, comme un défi après sa greffe, elle est retournée sur les terrains. Deux fois par semaine, elle s’entraîne avec l’équipe féminine d’Issy-les-Moulineaux (Hauts-de-Seine). Chaque samedi, c’est match. Elle sait qu’elle devra arrêter l’an prochain: elle ne peut plus risquer un mauvais coup. 

Elle voudrait balayer l’avenir, vivre au jour le jour. Mais les questions s’accumulent. "Vu de l’extérieur, les gens se disent que tout va bien. C’est une maladie qui devient chronique, d’accord. Mais de quelle manière ? Est-ce que, dans mon cerveau, quelque chose va disjoncter ? Est-ce que je vais avoir un problème cardiaque ? Est-ce que mes jambes vont se bloquer ? Vais-je faire un rejet ?" De sa greffe, elle garde une cicatrice à trois branches, du milieu du buste jusque dans le dos. "On appelle ça “la Mercedes” ! L’été, en maillot, il faut vraiment que je tombe sur un fétichiste pour qu’il apprécie!" 

Bon gré mal gré, elle a eu quelques compagnons. Elle a des amis et deux frères en Bretagne. Mais dans sa cuisine, devant la table, il n’y a qu’une chaise. "Il paraît que ça s’apprend, la solitude. Moi je la combats, par le sport et le bénévolat. C’est peut-être de l’hyperactivité, mais c’est ma façon de ne pas perdre la tête. Je relativise, et j’avance." 


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