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Faut-il traiter la ménopause  ?

  By Jean-Yves Nau, Le Monde

 February 8, 2003

Comment faut-il comprendre la ménopause, cette période de la vie de la femme qui correspond à la cessation de ses fonctions ovariennes et à la disparition de ses règles ? Est-ce un phénomène physiologique naturel, le contraire d'une maladie, le signe du temps qui passe contre lequel on ne peut rien faire ? Faut-il au contraire ne voir là qu'un ensemble de symptômes plus ou moins graves qui peuvent et doivent être traités au moyen de prescriptions d'hormones féminines - œstrogène et progestatif - qui viennent remplacer celles (œstradiol et progestérone) que les ovaires ne produisent plus ?

Ce sont ces questions qui sous-tendent la controverse autour des traitements hormonaux substitutifs (THS) de la ménopause ; une controverse récurrente qui vient ces derniers jours de prendre une nouvelle dimension avec l'initiative de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps) qui a jugé utile de faire sur ce thème une "mise au point" (Le Monde du 1er février).

Or, loin d'éclaircir les termes du débat cette initiative a eu pour conséquence d'ajouter un peu plus encore à la confusion quant aux bénéfices attendus et aux risques encourus par les femmes - elles sont en France environ 2 millions - qui sont sous THS. L'efficacité des différentes associations hormonales aujourd'hui commercialisées ne fait aujourd'hui l'objet d'aucune contestation. Il est ainsi bien établi que les THS préviennent les symptômes (bouffées de chaleur, sueurs nocturnes) qui surviennent après l'arrêt de la fonction ovarienne.

Ce traitement est également actif sur les modifications tissulaires de la paroi vaginale et de la vessie observées après la ménopause. De multiples études ont enfin démontré que ce traitement hormonal s'opposait au phénomène de perte de la masse osseuse (ostéoporose) et qu'à ce titre il permet de réduire notablement le risque de fractures des vertèbres, du poignet, puis du col du fémur. Reste enfin l'impact - controversé - du THS sur la pathologie cardio-vasculaire.

La question qui alimente la controverse sur la légitimité de ces thérapeutiques - ou sur leurs modalités d'administration - est celle de leur innocuité. Les bénéfices, indiscutables, sont-ils supérieurs aux risques auxquels s'exposent les femmes prenant ces traitements ? La principale difficulté réside ici dans le fait qu'il existe plusieurs types de THS. Si le progestatif est toujours administré par voie orale (comprimés), les œstrogènes peuvent être utilisés par voie orale, cutanée (gel, timbre ou patch), vaginale (anneau) et nasale (pulvérisateur). Il existe aussi des associations œstrogène-progestatif commercialisées sous forme de patch.

Deux études américaines - publiées en 1998 et en 2002 - sont à l'origine de la controverse, de l'inquiétude des femmes sous THS et de la "mise au point" de l'Afssaps. La première, menée auprès de plus de 2 000 femmes ménopausées ayant déjà souffert d'un accident cardiaque, concluait non seulement à l'absence de bénéfice cardio-vasculaire mais à une augmentation du risque d'accident thromboembolique lié au THS. La seconde, publiée en 2002 et menée auprès de 16 600 femmes, représentatives de la population moyenne des femmes ménopausées aux Etats-Unis, montrait une augmentation du risque d'accidents cardio-vasculaires et de cancers du sein associés à l'administration d'un THS (Le Monde du 20 juillet 2002).

Deux éléments importants doivent être soulignés. Le premier est l'amplitude de l'augmentation des risques observés. La dernière étude américaine estime notamment que, chez 10 000 femmes âgées de 50 à 70 ans et non traitées, 450 souffriront d'un cancer du sein, alors que dans la situation inverse, dans un groupe de 10 000 femmes traitées pendant cinq ans, on observera 8 cas supplémentaires par an. Ces chiffres peuvent paraître très faibles et expliquent pourquoi ils sont restés si longtemps indétectables par des médecins isolés. Cependant, appliqués aux 10 millions d'utilisatrices américaines ils sont évidemment inadmissibles (8 000 cas supplémentaires par an). Le nombre d'accidents vasculaires cérébraux augmenterait dans des proportions similaires, avec 8 cas supplémentaires par an pour 10 000 femmes sous THS.

Le second élément tient au fait que les études conduites outre-Atlantique ont été menées chez des femmes prenant un THS administré par voie orale comportant un œstrogène d'origine équine associé à un progestatif synthétique - la medroxyprogestérone acétate ou Prémarin -, association très prisée aux Etats-Unis mais pratiquement jamais utilisée en France. Les femmes concernées, âgées en moyenne de 63 ans, présentaient un fréquent excès de poids. Autant de données qui font dire à l'Afssaps que les résultats américains ne peuvent être simplement extrapolés aux femmes françaises sous THS.

BÉNÉFIQUE CONTRE L'OSTÉOPOROSE

Pour autant les responsables de l'Afssaps, soucieux d'appliquer ici le principe de précaution dans toute sa rigueur, viennent d'adresser une série de sévères recommandations aux médecins prescripteurs. Ils estiment notamment que, chez les femmes souffrant de troubles dus à une carence hormonale, l'une ou l'autre des formes de THS peut être prescrite "si la patiente le souhaite, à la dose minimale efficace, tant que durent les symptômes", le rapport bénéfice-risque plaidant selon eux pour une durée de traitement inférieure à cinq ans ; ce que contestent de nombreux spécialistes d'endocrinologie.

Chez les femmes ménopausées présentant des risques d'ostéoporose, l'Afssaps estime que le THS doit être instauré "le plus précocement possible", l'effet bénéfique sur la trame osseuse augmentant avec la dose d'œstrogène et cessant à l'arrêt du traitement. Là encore, la durée du traitement ne doit pas, selon l'agence, dépasser cinq ans. "Au-delà, il est difficile de formuler des recommandations compte tenu du risque de survenue d'effets indésirables, en particulier celui du cancer du sein, qui est corrélé à la durée du traitement et à l'âge de la femme", précise l'Afssaps aux médecins prescripteurs.

Elle ajoute, à l'attention des femmes : "Le THS, en retardant la ménopause, augmente le risque de survenue du cancer du sein par rapport aux femmes ménopausées non traitées. En effet, la ménopause aurait un effet protecteur sur le risque du cancer du sein." Une allégation qui conduit à reposer la question du statut, pathologique ou non, de la ménopause.

Jean-Yves Nau


Un appel contre les recommandations

Associés au travail de l'Afssaps et réunis au sein du conseil d'administration de l'Association française pour l'étude de la ménopause, les docteurs Jean-Claude Coleau, Evelyne Drapier-Faure, Monique Lé, Patrice Lopes et Henri Rozenbaum s'opposent aux recommandations officielles sur l'usage des THS. Ils viennent de publier un communiqué pour préciser leur point de vue. "Nous nous étonnons des recommandations pratiques contenues dans la mise au point de l'Afssaps sur le THS et nous estimons qu'elles ne reflètent ni notre opinion ni la nature des débats et discussions qui se sont déroulés lors d'une réunion multidisciplinaire en octobre 2002, écrivent-ils. Nous invitons les médecins prescripteurs à consulter les recommandations émises par l'Association française pour l'étude de la ménopause, plus conformes et plus adaptées à la situation actuelle." Philippe Duneton, directeur général de l'Afssaps, s'est déclaré étonné de cette réaction.


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